Analyse
Bénéfice à long terme du dépistage de l’anévrisme aortique abdominal
28 02 2011
Professions de santé
En 2004, nous avons analysé dans Minerva (1) la première publication de l’étude MASS (2) évaluant l’intérêt d’un dépistage systématique de l’anévrisme de l’aorte abdominale, chez l’homme. En 2007, nous avons commenté (3) les résultats à 10 ans de suivi moyen (4) pour cette étude sur un échantillon de 67 770 hommes âgés initialement de 65 à 74 ans. Le dépistage est effectué par ultrasons (avec suivi si présence d’un anévrisme). Versus absence de dépistage, un bénéfice était observé pour les décès relatifs à cet anévrisme (2% du total des décès) : HR de 0,52 (IC à 95% de 0,43 à 0,63). La réduction pour la mortalité totale (d’environ 30% dans les 2 groupes) était par contre beaucoup plus faible et à la limite de la signification statistique : HR 0,97 ; IC à 95% de 0,95 à 1,00.
Une méta-analyse de la Cochrane Collaboration (5), effectuée avant la publication des résultats à 10 ans de l’étude MASS, sommait les résultats de 4 études (127 891 hommes et 9 432 femmes au total). Elle ne montrait, de trois à cinq ans après le dépistage, aucune différence en termes de mortalité totale entre groupe dépisté et groupe non dépisté, aussi bien pour les hommes que pour les femmes. La mortalité liée à l’anévrisme de l’aorte abdominale et l’incidence de rupture d’anévrisme étaient diminuées pour l’homme mais non pour la femme (6).
En 2010 sont publiés les résultats d’un suivi sur 13 ans en moyenne d’une cohorte de 12 639 hommes au Danemark (étude VIBORG (7)), âgés de 64 à 73 ans à la randomisation entre ultrasons de dépistage (n=6 333) ou contrôles (n=6 306). La mortalité liée à l’anévrisme est significativement réduite avec le dépistage : HR 0,34 (IC à 95% de 0,20 à 0,57). La mortalité de toute cause n’est pas significativement réduite : HR 0,98 (IC à 95% de 0,93 à 1,03).
Les auteurs ajoutent une analyse coût-efficacité des résultats. L’ICER par année gagnée est de 157 euro (-3 292 à 4 401 euro) et par QALY de 179 euro (-4 083 à 4 682 euro).
Conclusion
Cette publication d’une étude danoise de suivi sur 13 ans en moyenne d’une cohorte d’hommes âgés de 64 à 73 ans, confirme les précédentes observations : un dépistage systématique de l’anévrisme de l’aorte abdominale par ultrasons dans cette tranche d’âge réduit la mortalité liée à l’anévrisme mais non significativement la mortalité totale. La place d’un tel dépistage systématique ou plus ciblé (chez les personnes à risque cardiovasculaire augmenté par exemple) reste à évaluer dans le cadre de notre programme national et/ou communautaire.
Références
- Bruyninckx R. Dépistage de l'anévrisme abdominal. MinervaF 2004;3(1):14-6.
- Ashton HA, Buxton MJ, Day NE, et al; Multicentre Aneurysm Screening Study Group. The Multicentre Aneurysm Screening Study (MASS) into the effect of abdominal aortic aneurysm screening on mortality in men: a randomised controlled trial. Lancet 2002;360:1531-9.
- Chevalier P. Dépistage de l’anévrisme abdominal (suite). MinervaF 2010;9(3):38.
- Thompson SG, Ashton HA, Gao L, Scott RA; Multicentre Aneurysm Screening Study Group. Screening men for abdominal aortic aneurysm: 10 year mortality and cost effectiveness results from the randomised Multicentre Aneurysm Screening Study. BMJ 2009;338:b2307.
- Cosford PA, Leng GC. Screening for abdominal aortic aneurysm. Cochrane Database Syst Rev 2007, Issue 2.
- Chevalier P. Dépistage de l’anévrisme abdominal. MinervaF 2007;6(8):128.
- Lindholt JS, Sorensen J, Sogaard R, Henneberg EW. Long-term benefit and cost-effectiveness analysis of screening for abdominal aortic aneurysms from a randomized controlled trial. Br J Surg 2010;97:826-34.
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