Revue d'Evidence-Based Medicine



Généralistes et infirmières, partenaires pour le suivi des patients chroniques?



Minerva 2006 Volume 5 Numéro 7 Page 97 - 97

Professions de santé


 

Différentes études ont récemment évalué l’intérêt d’un suivi par des infirmières particulièrement formées à l’accompagnement des patients atteints d’insuffisance cardiaque chronique stable. La plupart de ces études ont montré des résultats favorables sur  l’observance thérapeutique et sur les résultats thérapeutiques (moins de réhospitalisations par exemple) 1-3 même si d’autres études nuancent le bénéfice, entre autres chez des personnes à moindre risque 4,5. La dernière étude en date1 montre un résultat favorable d’un suivi téléphonique assuré par des infirmières. La littérature publie depuis plus de dix ans différents articles montrant les bons résultats cliniques du suivi des patients chroniques, en particulier les diabétiques de type 2, par des infirmières 6.

Toutes ces expériences, riches de promesses, ne peuvent exister et se développer que si un travail interdisciplinaire le permet. Tant dans les étapes préparatoires que dans le suivi des patients, où l’accompagnement éducatif a une place de choix 7.

Tous les professionnels en relation avec les patients sont concernés par les démarches éducatives pour un suivi optimal. Ceci demande au minimum une concertation des professionnels entre eux et au mieux un partenariat avec le patient. Le travail en équipe où les participants se connaissent et réalisent ensemble des projets de santé facilite ces démarches éducatives. Quelle peut être la place de ce type d’intervention en Belgique? Les médecins, en particulier, les généralistes, sont-ils prêts à accepter que des conseils (y compris médicamenteux) soient donnés par des infirmières (par téléphone ou de vive voix), par des pharmaciens? Comment le patient vit-il ce type d’intervention en première ligne de soins? La réussite des collaborations interdisciplinaires dans les soins palliatifs au domicile peut inciter à l’optimisme dans la réalisation de telles collaborations.

Il s’agit cependant ici de démarches éducatives spécifiques, qui demandent une formation elle aussi spécifique, mais ces démarches n’en sont que plus riches quand elles sont partagées par plusieurs intervenants. L’infirmière à domicile, le médecin traitant ou le médecin spécialiste peuvent eux aussi s’investir dans un accompagnement éducatif, pour peu qu’ils s’y forment et y accordent les priorités suffisantes (e.a. en termes de temps). Ces formations à l’éducation thérapeutique demandent une sensibilisation significative à l’importance de l’écoute et au développement de l’empathie 8,9. Domaines familiers pour les généralistes qui gardent une approche globale et polyvalente du patient vivant dans son contexte. Etre à l’aise avec les étapes de l’entretien motivationnel est une bonne ressource. Prendre en compte les représentations du patient de sa santé et de sa (ses) maladie(s), ses projets de vie, le rôle de l’entourage, les étapes d’acceptation de la maladie ou le deuil de la santé d’hier et, enfin, développer nos capacités relationnelles de négociation réciproque et respectueuse du patient, de ses valeurs et de ses choix, autant de facettes de la pratique médicale.

L’actuelle répartition inégale des généralistes sur notre territoire, en particulier en défaveur de régions éloignées des villes ou dans les quartiers pauvres de celles-ci, avec une éventuelle répartition non efficiente des tâches, devient une nouvelle donne dont nous devons tenir compte. Le vieillissement de la population avec un plus grand nombre d’affections chroniques est une autre réalité tout aussi incontournable. Des pistes nouvelles pour l’accompagnement de ces nombreux patients chroniques doivent être dessinées. Un partenariat patient-généraliste-infirmière est une de ces pistes, avec une collaboration possible du pharmacien et d’autres intervenants.

J. Laperche et P. Chevalier

 

Références

  1. GESICA Investigators. Randomised trial of telephone intervention in chronic heart failure: DIAL trial. BMJ 2005;331:425-9.
  2. Stromberg A. The crucial role of patient education in heart failure. Eur J Heart Fail 2005;7:363-9.
  3. DeWalt DA, Pignone M, Malone R et al. Development and pilot testing of a disease management program for low literacy patients with heart failure. Patient Educ Couns 2004;55:78-86.
  4. Galbreath AD, Krasuski RA, Smith B et al. Long-term health care and cost outcomes of disease management in a large, randomized, community-based population with heart failure. Circulation 2004;110:3518-26.
  5. DeBusk RF, Miller NH, Parker KM et al. Care management for low-risk patients with heart failure: a randomized, controlled trial. Ann Intern Med 2004;141:606-13.
  6. Toombs SK. The meaning of illness: a phenomenological account of the different perspectives of physician and patient. Dordrecht: Kluwer Academic Publishers, 1992.
  7. Horrock S, Anderson E, Salisbury C. Systematic review of whether nurses practitioners working in primary care can provide equivalent care to doctors. BMJ 2002;324:819-23.
  8. Cagnaire R, d’Yvernois JF. Apprendre à éduquer le patient. Paris: Maloine, 2004.
  9. ANAES. L’information du patient: recommandations destinées aux médecins. Dossier de presse. ANAES 27 avril 2000. http://www.anaes.fr/ (consulté le 9 juin 2006).
Généralistes et infirmières, partenaires pour le suivi des patients chroniques?

Auteurs

Chevalier P.
médecin généraliste
COI :

Laperche J.
Centre Académique de Médecine Générale, UCL et Fédération des Maisons Médicales
COI :

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