Analyse
Consommation modérée de café : moins d’insuffisances cardiaques
15 10 2013
Professions de santé
Texte sous la responsabilité de la rédaction néerlandophone
Nous avons précédemment publié dans la revue Minerva (1) une analyse qui montrait qu’une consommation modérée de café diminuait le risque de diabète de type 2. Les données restent contradictoires concernant la relation entre consommation de café et risque cardiovasculaire. Le risque d’hospitalisation ou de décès suite à une insuffisance cardiaque serait de 17% plus élevé chez les hommes qui boivent au moins 5 tasses de café par jour, versus ceux qui ne boivent pas de café (2).
Une autre étude attribue au café un rôle protecteur contre l’insuffisance cardiaque (3). Pour augmenter la confusion, certains auteurs avancent que la consommation de café ou non n’a aucune importance en ce domaine (4,5). Toutes ces études étaient de taille plutôt modeste, et leur puissance était probablement insuffisante pour montrer l’existence d’un lien.
Mostofsky et coll (6) ont recherché dans la littérature les études pertinentes évaluant l’effet du café sur l’insuffisance cardiaque. Ils sont remontés jusqu’à 1966 en consultant plusieurs banques de données (CINAHL, Embase, Pubmed). Ils ont également utilisé les listes de références des études sélectionnées. Ils ont finalement inclus 5 études de cohortes prospectives qui mentionnaient les rapports des cotes ou les incidences (avec intervalle de confiance à 95%) pour l’insuffisance cardiaque et la mortalité. Les études ont été publiées entre 2001 et 2011 et concernent 6 522 cas d’insuffisance cardiaque chez 140 220 participants. Les auteurs ont observé un rapport entre la consommation de café et l’apparition d’une insuffisance cardiaque suivant une courbe en forme de J, c’est-à-dire que, tant qu’elle reste modérée, la consommation de café réduit le risque d’insuffisance cardiaque, alors qu’une consommation plus importante est sans influence (voir tableau).
Tableau. Risque relatif avec IC à 95% d’insuffisance cardiaque en fonction de la consommation de café, la référence étant 0 tasse de café par jour.
Nombre de tasses de café par jour |
RR d’insuffisance cardiaque |
Intervalle de confiance à 95 % |
1 - 2 |
0,96 |
0,90 – 0,99 |
2 – 3 |
0,93 |
0,86 – 0,99 |
3 – 4 |
0,89 |
0,81 – 0,99 |
4 – 5 |
0,91 |
0,83 – 1,01 |
5 – 6 |
0,93 |
0,85 – 1,02 |
6 – 7 |
0,95 |
0,87 – 1,05 |
7 – 8 |
0,97 |
0,89 – 1,07 |
8 – 9 |
0,99 |
0,90 – 1,10 |
9 - 10 |
1,01 |
0,90 – 1,14 |
10 - 11 |
1,03 |
0,89 – 1,19 |
Les résultats repris dans ce tableau montrent qu’il pourrait exister une relation inverse entre la consommation de café et l’insuffisance cardiaque lorsque la consommation ne dépasse pas quatre tasses par jour (11% de risque en moins). L’analyse de l’intervalle de confiance (borne supérieure à 0,99%) jette cependant un doute sur la pertinence clinique de ce RR. Il n’y a pas de différence entre les hommes et les femmes. Un antécédent d’infarctus myocardique ou de diabète sucré ne modifie pas le résultat. La plupart des études ont corrigé les résultats en tenant compte de différents facteurs de confusion : risque cardiovasculaire, diabète, mais aussi obésité, tabagisme, sédentarité, consommation d’alcool, consommation de thé et mode de préparation du café. Toutes les études ont été menées en Scandinavie (4 en Suède et 1 en Finlande), ce qui n’est pas pour faciliter l’interprétation des résultats. Nous pouvons supposer qu’il s’agissait généralement de café « caféiné », mais la concentration (le fait que le café soit plus ou moins fort) peut varier en fonction du mode de préparation. En outre, comme la consommation de café est exprimée en nombre de tasses par jour, la mesure dépend de la taille de la tasse ; le contenu d’une tasse varie généralement entre 125 et 150 ml. Nous connaissons également mal le rôle de l’hypertension dans le lien entre café et insuffisance cardiaque. La littérature souffle le chaud et le froid concernant l’influence du café sur la pression artérielle. Une méta-analyse récente montre que la pression artérielle augmente légèrement avec la consommation de café mais qu’au-delà de 3 tasses par jour, ce risque disparaît (7).
Conclusion
Cette méta-analyse d’études de cohortes prospectives suggère que l’incidence de l’insuffisance cardiaque diminue avec une consommation modérée de café (± 4 tasses par jour) mais les chiffres sont de pertinence clinique douteuse.
Références
- Laekeman G. Le café protège-t-il du diabète? MinervaF 2005;4(7):102-4.
- Wilhelmsen L, Rosengren A, Eriksson H, Lappas G. Heart failure in the general of men – morbidity, risk factors and prognosis. J Intern Med 2001;249:253-61.
- Mukamal KJ, Hallqvist J, Hammar N, et al. Coffee consumption and mortality after acute myocardial infarction: the Stockholm Heart Epidemiology Program. Am Heart J 2009;157: 495-501.
- Ahmed HN, Levitan EB, Wolk A, Mittleman MA. Coffee consumption and risk of heart failure in men: an analysis from the Cohort of Swedish Men. Am Heart J 2009;158:667-72.
- Levitan EB, Ahmed HN, Mittleman MA, Wolk A. Coffee consumption and incidence of heart failure in women. Circ Heart Fail 2011;4: 414-8.
- Mostofsky E, Rice MS, Levitan EB, Mittleman MA. Habitual coffee consumption and risk of heart failure: a dose-response analysis. Circ Heart Fail 2012;5401-5.
- Zhang Z, Hu G, Caballero B, et al. Habitual coffee consumption and risk of hypertension: a systematic review and meta-analysis of prospective observational studies. Am J Clin Nutr 2011;93:1212-9.
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