Analyse
Statines et insuffisance rénale
15 02 2014
Professions de santé
Texte sous la responsabilité de la rédaction francophone
Peu de scores d’évaluation du risque cardiovasculaire incluent la fonction rénale dans les facteurs de risque ; nous n’en n’avons identifié que 2 parmi ceux que nous avons répertoriés dans une étude comparative (1). Les guides de pratique concernant la prescription des statines ou plus largement la prévention cardiovasculaire ne donnent également pas de recommandations spécifiques pour les personnes présentant une insuffisance rénale.
La recherche dans la littérature pour un Consensus de l’INAMI (2) concernant « L’usage efficient des médicaments dans la prévention des affections cardiovasculaires » en 2009 avait isolé une méta-analyse (3) montrant que , en cas d’insuffisance rénale, les statines n’avaient une action préventive cardiovasculaire (morbidité) et contre la mortalité globale qu’au stade de pré-dialyse. Ce qui n’était en effet plus le cas chez les patients greffés ni pour le groupe sous dialyse. Ce traitement se montrait cependant sûr en particulier en ce qui concerne les effets indésirables majeurs tels que l’hépatotoxicité et la rhabdomyolyse (3). L’étude 4D était également présentée (4), évaluant l’atorvastatine chez des patients souffrant de diabète de type 2 et en dialyse. Elle ne montrait aucune réduction significative du critère de jugement primaire composite (mortalité cardiovasculaire + infarctus du myocarde non fatal + AVC non fatal) sous atorvastatine.
Une nouvelle méta-analyse, de bonne qualité méthodologique globale, a été publiée en 2013 (5). Elle inclut 31 RCTs évaluant l’efficacité des statines chez les sujets (n = 48 429) en insuffisance rénale de différents grades de sévérité et avec un risque cardiovasculaire variable. Les statines réduisent le risque d’évènement cardiovasculaire de façon significative : RR de 0,77 avec IC à 95 % de 0,70 à 0,85 , valeur p < 0,001 et test I² à 53,8 %. Des analyses sont faites en fonction de la sévérité de l’insuffisance rénale en RAR sur la durée moyenne d’étude (0,38 à 5 ans) : 2,2 % en cas de grade CKD 5 (eGFR < 15 ml/min/1,73m² ) soit un NST de 46 avec IC à 95 % de 25 à 257 ; 2,8 % en cas de grade 4 (eGFR 15-30 ml/min/1,73m²) soit un NST de 36 avec IC à 95 % de 19 à 330 et 4,2 % en cas de grade 3 (eGFR 30-60 ml/min/1,73m²) ou 2 (eGFR 60-90 ml/min/1,73m²) soit un NST de 24 avec IC à 95 % de 19 à 32. Aucun effet significatif sur l’évolution de la fonction rénale n’est observé.
Il n’y a malheureusement pas de données spécifiques en fonction du niveau de risque cardiovasculaire initial.
Les auteurs n’ont pas observé d’augmentation des événements indésirables avec les statines dans cette population avec insuffisance rénale.
Conclusion
Cette méta-analyse montre un bénéfice de l’administration de statines chez des sujets en insuffisance rénale, avec ou sans facteurs de risque cardiovasculaire identifiés. Le bénéfice est de moindre ampleur et moins précis en cas d’insuffisance rénale plus sévère.
Références
- Chevalier P. Evaluation du risque cardiovasculaire: tour d'horizon des différentes tables de risque. MinervaF 2004;3(4);54-8.
- L’usage efficient des médicaments dans la prévention des affections cardiovasculaires. Réunion de Consensus, INAMI 14 mai 2009. Rapport du jury.
- Strippoli GF, Navaneethan SD, Johnson DW, et al. Effects of statins in patients with chronic kidney disease: meta-analysis and meta-regression of randomised controlled trials. BMJ 2008;336:645-51.
- Wanner C, Krane V, März W, et al; German Diabetes and Dialysis Study Investigators. Atorvastatin in patients with type 2 diabetes mellitus undergoing hemodialysis. N Engl J Med 2005;21;353:238-48.
- Hou W, Lv J, Perkovic V, et al. Effect of statin therapy on cardiovascular and renal outcomes in patients with chronic kidney disease: a systematic review and meta-analysis. Eur Heart J 2013;34:1807-17.
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