Analyse


Mesures automatiques répétées de la pression artérielle : une méthode intéressante


01 07 2020

Professions de santé

Infirmier, Médecin généraliste
Analyse de
Roerecke M, Kacazorowski J, Myers MG. Comparing automated office blood pressure readings with other method of blood pressure measurement for identifying patient with possible hypertension: a systematic review and meta-analysis. JAMA 2019;179:351-62. DOI: 10.1001/jamainternmed.2018.6551


Conclusion
Cette synthèse méthodique avec méta-analyse d’études transversales montre que la moyenne d’une série de mesures automatiques répétées de la pression artérielle au cabinet du médecin correspond à la moyenne quotidienne d’une mesure ambulatoire de la pression artérielle sur 24 heures. Si cette méthode doit être utilisée comme base pour le diagnostic et le suivi de l’hypertension artérielle, les résultats en termes de morbidité et de mortalité devront encore être testés par rapport à ceux de la mesure de la pression artérielle à domicile (par le patient lui-même) ou de la surveillance ambulatoire de la pression artérielle sur 24 heures.


Que disent les guides de pratique clinique ?
La recommandation révisée de Domus Medica sur l’hypertension artérielle reste la référence pour la prise en charge de l’hypertension artérielle par les médecins généralistes. Cette étude montre que, une fois exclue l’hypertension artérielle masquée, les mesures automatiques répétées de la pression artérielle peuvent être considérées comme une méthode alternative. À cette fin, un appareil adéquatement automatisé prend au moins trois mesures consécutives de la pression artérielle à une ou deux minutes d’intervalle sur un patient installé dans une pièce calme et sans que le médecin généraliste soit présent. À partir de la moyenne de ces trois mesures, on peut déterminer la suite de la prise en charge de l’hypertension artérielle du patient.



La littérature scientifique nous apprend que, pour contrôler la pression artérielle, la mesure de la tension à domicile est plus efficace que la mesure classique chez le médecin (généraliste) (1,2). La mesure ambulatoire de la pression artérielle sur 24 heures est la méthode de référence, mais il ne va pas de soi de l’appliquer en première ligne « à cause de sa complexité et de son rapport coûts/bénéfices défavorable » (3,4). Les avantages de ces deux méthodes de mesure pourraient être combinés dans les « mesures automatiques répétées de la pression artérielle » effectuées lors de la consultation chez le médecin généraliste. Pour cela, on doit disposer d’un tensiomètre oscillométrique automatique particulier qui mesure la pression artérielle de manière répétée (trois à cinq fois) à une ou deux minutes d’intervalle sans intervention ni du patient ni du médecin. Le patient prend place dans un endroit calme du cabinet, et le médecin généraliste lance la série de mesures, puis disparaît. Comme le médecin généraliste n’est pas physiquement présent, l’artéfact de « la blouse blanche » est absent. En 2011, un médecin généraliste en formation professionnelle a consacré son mémoire de master complémentaire à cette méthode (5). Il en a examiné la faisabilité dans la pratique chez 32 sujets et a constaté que les patients n’étaient « absolument pas réticents » à cette méthode.

 

Aujourd’hui, des années plus tard, la première méta-analyse de cette méthode de mesure est publiée dans la littérature médicale (6). Cette étude a comparé les valeurs de pression artérielle obtenues par des mesures automatiques répétées, par la mesure classique et par la mesure ambulatoire de la pression artérielle sur 24 heures. 31 études remplissaient les critères d’inclusion : au moins 30 sujets par étude, les différentes méthodes de mesure devaient avoir lieu dans un délai d’un mois, l’intervalle entre deux mesures automatiques répétées de la pression artérielle devait être de 2 minutes maximum et au moins trois mesures consécutives devaient être effectuées. Les études se sont déroulées principalement dans des pays à revenu élevé et totalisaient 9279 patients âgés en moyenne de 55,9 ans (39 à 69,5 ans). Il s’agissait surtout d’études transversales (71%). Deux tensiomètres automatiques différents ont été utilisés, et six études ont été réalisées en première ligne. Les résultats de l’étude sont mentionnés ci-dessous.

  • Pour les pressions systoliques supérieures à 130 mmHg selon la méthode des mesures automatiques répétées, une méta-analyse de 9 études a montré que la méthode classique donnait une valeur plus élevée, la différence moyenne poolée étant de 14,49 mmHg en moyenne (avec IC à 95% de 11,83 à 17,15 ; I² = 94,3% ; p < 0,001).
  • Une méta-analyse de 19 études n’a montré aucune différence avec la valeur obtenue par la mesure ambulatoire de la pression artérielle sur 24 heures (différence moyenne de 0,29 mmHg avec IC à 95% de -1,13 à 1,71 ; I² = 89% ; p < 0,001). Il y avait une importante hétérogénéité statistique entre les études, mais l’hétérogénéité clinique s’est avérée faible.   

 

Cette étude, qui est principalement basée sur des recherches transversales, ne permet toutefois pas de se prononcer sur la corrélation entre, d’une part, les mesures automatiques répétées de la pression artérielle et, d’autre part, la mortalité et la morbidité, ni sur les valeurs normales et cibles les plus précises avec cette méthode de mesure. On ne sait pas non plus si cette méthode permet de détecter une hypertension artérielle masquée ni si les mêmes résultats peuvent également être obtenus par le pharmacien ou l’infirmier/ère. Une recherche complémentaire est donc encore nécessaire, mais, sur la base de cette méta-analyse qui n’a pas montré de différence entre les mesures automatiques répétées chez le médecin généraliste et la mesure ambulatoire de la pression artérielle sur 24 heures, on peut penser qu’elle pourrait être utile dans le diagnostic et le suivi de l’hypertension artérielle, si elle est acceptable pour le médecin et pour le patient (5).

 

Conclusion 

Cette synthèse méthodique avec méta-analyse d’études transversales montre que la moyenne d’une série de mesures automatiques répétées de la pression artérielle au cabinet du médecin correspond à la moyenne quotidienne d’une mesure ambulatoire de la pression artérielle sur 24 heures. Si cette méthode doit être utilisée comme base pour le diagnostic et le suivi de l’hypertension artérielle, les résultats en termes de morbidité et de mortalité devront encore être testés par rapport à ceux de la mesure de la pression artérielle à domicile (par le patient lui-même) ou de la surveillance ambulatoire de la pression artérielle sur 24 heures.

 

Pour la pratique 

La recommandation révisée de Domus Medica sur l’hypertension artérielle reste la référence pour la prise en charge de l’hypertension artérielle par les médecins généralistes (7). Cette étude montre que, une fois exclue l’hypertension artérielle masquée, les mesures automatiques répétées de la pression artérielle peuvent être considérées comme une méthode alternative. À cette fin, un appareil adéquatement automatisé prend au moins trois mesures consécutives de la pression artérielle à une ou deux minutes d’intervalle sur un patient installé dans une pièce calme et sans que le médecin généraliste soit présent. À partir de la moyenne de ces trois mesures, on peut déterminer la suite de la prise en charge de l’hypertension artérielle du patient.

 

 

Références 

  1. De Cort P. Peut-on baser le traitement de l'hypertension sur des mesures à domicile? MinervaF 2005;4(6):94-6.
  2. Staessen JA, Den Hond E, Celis H, et al. Antihypertensive treatment based on blood pressure measurement at home or in the physician’s office. JAMA 2004;291:955-64. DOI: 10.1001/jama.291.8.955
  3. De Cort P. Diagnostic de l’HTA : mesures conventionnelles, au domicile ou monitoring de 24 heures ? MinervaF 2012;11(2):17-8.
  4. Hodgkinson J, Mant J, Martin U, et al. Relative effectiveness of clinic and home blood pressure monitoring compared with ambulatory blood pressure monitoring in diagnosis of hypertension: systematic review. BMJ 2011;342:d3621. DOI: 10.1136/bmj.d3621
  5. Vloemans Y. Haalbaarheid van implementatie van geautomatiseerde repetitieve bloeddrukmeting in de eerste lijn. Masterproef ICHO 2012
  6. Roerecke M, Kacazorowski J, Myers MG. Comparing automated office blood pressure readings with other method of blood pressure measurement for identifying patient with possible hypertension:  a systematic review and meta-analysis. JAMA 2019;179:351-62. DOI: 10.1001/jamainternmed.2018.6551
  7. De Cort P, Christiaens T, Philips H, et al. Hypertension (Révision). SSMG 2009. Ou : Hypertension. Ebpracticenet 1/11/2009.

 

 


Auteurs

De Cort P.
em. Huisartsgeneeskunde, KU Leuven
COI :

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