Revue d'Evidence-Based Medicine
Procréation médicalement assistée et petit poids de naissance
Minerva 2002 Volume 1 Numéro 10 Page 39 - 40
Professions de santé
Minerva « en bref » vous propose de brefs commentaires sur des publications sélectionnées par le comité de rédaction de Minerva. Des études intéressantes et pertinentes pour les médecins généralistes qui ne doivent pas ou ne peuvent pas être discutées dans un cadre plus large trouvent leur place dans cette rubrique. Chaque sélection est brièvement résumée et accompagnée de quelques commentaires faits par un référent. La rédaction de Minerva vous en souhaite une agréable lecture.
RésuméCette étude dans la population générale reprend les données de 42 463 enfants nés aux États-Unis (E.U.) de femmes entre 20 et 60 ans, et conçus par une procédure de procréation médicalement assistée ou PMA, pratiquée en 1996 et 1997. Une PMA est définie comme toute procédure de traitement d’infertilité durant laquelle l’ovule aussi bien que le sperme sont manipulés in vitro. Les pourcentages observés de petits poids de naissance (< 2500 gr) et de très petits poids de naissance (< 1500 gr) ont été comparés aux pourcentages attendus, obtenus sur base des chiffres de prévalence est le nombre de maladies ou de malades dans une population à un moment donné (prévalence ponctuelle, Eng: point prevalence). La prévalence est exprimée la plupart du temps sous forme de pourcentage, appelé le chiffre de prévalence. C’est le nombre de malades divisé par le nombre total de personnes examinées qui risquent de présenter cette maladie (exprimé pour 1000 ou 10 000 personnes). Quand on observe le nombre de malades pendant une période déterminée (un mois, un an) on parle de prévalence de période (Eng: period prevalence).">prévalence observés dans une population totale de 3 389 098 enfants, nés de femmes de 20 ans ou plus aux E.U. en 1997, après ajustement par rapport à l’âge et à la parité. Dans des analyses secondaires, il a été tenu compte de l’effet possible d’une réduction embryonnaire sur le poids de naissance en excluant les grossesses au cours desquelles le nombre d’embryons avait été réduit. Dans un deuxième groupe de sous-analyses, une distinction a été établie entre l’effet de la technique de la PMA elle-même et l’effet lié aux caractéristiques du patient ou de l’embryon, sur le poids de naissance (groupe donneur d’ovule et pas de stérilité masculine, versus groupe « stérilité masculine » versus groupe «mère porteuse »). Des 42463 enfants, 43% étaient enfants uniques, 43% des jumeaux, 12% des triplés et 1% des quadruplés ou plus. Le % de petits poids de naissance était de 13% pour les enfants uniques, 55% pour les jumeaux, 92% pour les triplés et presque de 100 % pour les quadruplés ou plus. Pour le très petit poids de naissance, le pourcentage variait de 2,5 % pour les grossesses uniques à 67% pour les quadruplés ou plus. Les enfants uniques nés de grossesses après PMA avaient un risque significativement plus élevé de petit poids à la naissance et de très petit poids de naissance, comparé à tous les enfants uniques nés aux E.U. : l’cote (Eng : odds) représente un rapport de risque, le rapport entre la probabilité de survenue d’une maladie ou d’un évènement et la probabilité de non survenue de cette maladie ou de cet évènement. Un rapport de cotes est un rapport entre 2 cotes.">odds ratio (OR) pour le petit poids de naissance était de 1,8 (IC à 95%: 1,7 à 1,9) et l’OR pour très petits poids de naissance était de 1,8 (95 % IC 1,7 à 2,0). Cette augmentation de risque restait ± inchangée dans les sousanalyses, sauf quand l’analyse portait uniquement sur les enfants nés d’une mère porteuse, pour lesquels la différence n’était pas significative. Les enfants nés à terme couraient un plus grand risque de petit poids à la naissance avec un OR de 2,6 (IC à 95%: 2,4 à 2,7), alors que pour les prématurés, l’augmentation de risque était moins importante (OR 1,4 avec IC à 95%: 1,3 à 1,5). Dans le dernier groupe, il n’y avait pas d’augmentation de risque importante si l’analyse se limitait aux enfants portés par une femme en bonne santé (groupe « stérilité masculine » + groupe «mères porteuses »). Pour les jumeaux, le risque de petit poids de naissance, aussi bien chez les enfants nés à terme que chez les prématurés était comparable à celui des jumeaux nés aux E.U. dans la population générale. Analyse L’utilisation de la totalité d’une population comme groupe de recherche réduit au minimum le biais de sélection d’une part et permet de faire, grâce au grand groupe étudié, une estimation précise des risques d’autre part. Cela se remarque à l’intervalle de confiance (IC) réduit autour des odds ratios. Le critère de jugement est un résultat aisément mesurable et chiffrable, pour lequel il existe peu d’hésitations quant à savoir s’il a été mesurés uniformément dans les groupes recherche et de contrôle. Le fait que le groupe de population étudié fasse également partie du groupe contrôle, nommément la population totale des E.U., peut éventuellement avoir réduit la différence de risque entre les groupes. Mais étant donné qu’en 1997, les naissances survenues après PMA représentaient à peine 0,6% du nombre total des naissances aux E.U., cet effet de diminution est à négliger. Cette étude permet surtout de distinguer l’effet propre de la PMA de l’effet éventuel lié au patient ou à l’embryon sur la croissance de celui-ci. Le fait que le risque élevé d’un petit poids de naissance chez des enfants nés de naissance simple soit plutôt constant dans les différents sous-groupes d’analyses, suggère qu’il y a manifestement un effet direct de la procédure de PMA sur le développement de l’embryon. Pour les enfants prématurés uniquement, ce risque disparaît lorsque l’enfant est porté par une « femme saine », ce qui suggère que l’augmentation du risque est dans ce cas plus liée à des facteurs maternels qu’à la PMA ellemême. Ces résultats se doivent d’être interprétés avec plus de précaution, vus les petits effectifs dans ces groupes. Le fait qu’il n’y ait pas d’augmentation de risque identifié pour les jumeaux peut certainement s’expliquer par le fait que l’effet additionnel des PMA sur celui des grossesses multiples par rapport au risque de faible poids de naissance est à négliger. Les auteurs mentionnent que, bien qu’elles soient statistiquement non significatives, des différences existent dans les caractéristiques maternelles et dans les techniques de PMA employées entre le groupe de femmes de la population étudiée (42 463 enfants conçus après PMA) et le population totale des femmes chez lesquelles une PMA avait été pratiquée endéans ces mêmes 2 ans (136 972). La population étudiée avait un meilleur pronostic : un âge moins élevé,multipares, pas de PMA antérieure, utilisation d’embryons frais. Ceci a pour conséquence que les résultats de l’étude ne sont pas entièrement transposables à la population totale de femmes qui ont subi une PMA aux E.U.
ConclusionCette étude de population montre que les enfants issus de naissance simple et conçus avec l’aide d’une PMA ont un risque presque doublé d’avoir un petit poids de naissance comparé à ce type de naissance dans la population générale et suggère aussi que cet effet est directement associé avec une procédure de PMA. C’est pour les enfants nés à terme que l’accroissement de risque est le mieux établi. L’influence des facteurs de stérilité de la femme ou de l’homme sur la croissance de l’embryon ou l’influence des caractéristiques de l’embryon lui-même sur sa croissance devra être précisée dans le futur.
Conflits d’intérêt/financement Pas de conflits d’intérêt ou de financement mentionnés. |
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