Pour une FMC indépendante

La formation médicale continu(é)e (FMC) est un enjeu important. Elle est un moyen important de modification de comportement, particulièrement dans le domaine de la prescription, chez les praticiens.

Le rôle joué par les firmes pharmaceutiques dans ce domaine de la FMC a déjà été analysé dans un précédent éditorial de Minerva (1). Les firmes sont impliquées dans des activités clairement sponsorisées, dans le démarchage des « délégués médicaux », dans la presse sponsorisée et distribuée gratuitement, dans les documents écrits ou électroniques envoyés aux médecins. Les firmes exercent aussi une influence non toujours transparente sur le choix des thèmes et des orateurs dans les activités de FMC organisée par la profession ou ses sociétés et institutions (2). Elles ont également recours à des leaders d’opinion pour influencer localement les prescripteurs (1).

L’autre source d’information disponible, disposant de moyens nettement moindres, est indépendante d’intérêts financiers, par exemple en Belgique, les Recommandations de Bonne Pratique, les publications et le site du Centre Belge d’Information Pharmacothérapeutique (CBIP), les publications et sites des représentants de l’International Society of Drugs Bulletin (CBIP déjà cité, le Formul®Info de Farmaka, La Lettre du GRAS et la revue Minerva), les visiteurs indépendants (Projekt Farmaka). Il est bien établi qu’il existe « des différences importantes entre l’information disséminée par l’industrie et par les sources indépendantes » (3). L’accès à cette information indépendante nécessite une démarche plus active, bien au-delà d’une information subie plus ou moins volontairement comme peut l’être celle envahissante des firmes pharmaceutiques (journaux médicaux, congrès et autres réunions médicales). Elle est aussi bénéfique : après une information concernant une pharmacothérapie rationnelle pour les infections des voies respiratoires supérieures et l’hypertension artérielle, les médecins généralistes améliorent leurs prescriptions (4). Dans une même approche d’information indépendante, des tests de lecture peuvent contribuer à améliorer la prescription et la dispensation des soins (5).

Tests de lecture dans le cadre de la FMC

La Revue Prescrire saluait récemment dans un éditorial (6) ses Lecteurs Emérites : « Leurs motivations ont surtout des fondements éthiques et professionnels : améliorer leurs connaissances et leur niveau de compétence pour un meilleur service rendu aux patients. D’autres motivations sont aussi le besoin de stimulation intellectuelle et d’autoévaluation, l’envie de partager avec des collègues, la volonté de reconnaissance et d’accréditation. » Les lecteurs émérites de la Revue Prescrire sont ceux qui complètent, avec succès, ses tests de lecture, tests portant sur la lecture de la Revue. De tels tests de lecture ont montré qu’ils avaient un effet sur la mémorisation de nouvelles connaissances, avec un impact sur la qualité des soins assurés au quotidien comme mentionné ci-dessus (5). 

Depuis mai 2009, Minerva propose également des tests de lecture de certains numéros (2 modules par an, chaque module portant sur 1 ou 2 numéros de la revue, tous les articles étant disponibles en ligne). Chaque module comporte 10 questions, questions à choix multiple pour la réponse. Pour accéder à la question suivante, il est indispensable de répondre correctement à la question précédente. Ces modules donnent accès à une accréditation.

Minerva propose aussi un module particulier. Une analyse d’une publication d’une intervention thérapeutique (RCT) publiée dans Minerva est commentée, rubrique par rubrique, avec des références à des concepts EBM généraux qui sont explicités et une démonstration de l’application de ces concepts dans l’analyse présentée. Un test de lecture est joint, comme aide à la mémorisation de cette démarche de lecture critique. D’autres modules suivront concernant d’autres analyses et d’autres types d’études (synthèses méthodiques, méta-analyses).

L’avenir

Une étape ultérieure devrait être franchie dans les prochains mois par la revue Minerva. Confronté à des questions cliniques au niveau de sa pratique, le médecin ou autre professionnel de la santé cherche des réponses en complément de sa propre expérience en visant une mise à jour de ses connaissances. Il souhaite souvent une réponse rapide, quitte à étudier le problème plus en détail ensuite. Un projet fédéral belge se dessine, en lien avec le dossier médical informatisé, pour donner accès, à partir des codes diagnostiques d’un dossier individuel, aux recommandations validées et à une synthèse des données EBM sur le sujet. Minerva collabore à ce projet regroupant toutes les sources d’information indépendantes et EBM belges. Un lien sera donc établi entre des questions cliniques et les publications de Minerva.

La Formation Médicale Continue prend ainsi une toute autre dimension, s’éloignant des cours ex cathedra, beaucoup plus proche de la pratique quotidienne avec toutes ses interrogations des praticiens comme des patients.

Références

1. Chevalier P, De Meyere M. La formation médicale sans tain. MinervaF 2007;6(4):49.
2. Moynihan R. Doctors’ education: the invisible influence of drug company sponsorship. BMJ 2008;336:416-7.
3. Van Linden A, Carbonnelle S, Kohn L, et al. Valeur en termes de données probantes des informations écrites de l’industrie pharmaceutique destinées aux médecins généralistes. Centre Fédéral d’expertise des soins de santé, 2007. KCE reports 55B.
4. Akici A, Kalaça S, Ugurlu MU, et al. Impact of a short postgraduate course in rational pharmacotherapy for general practitioners. Br J Clin Pharmacol 2003;57:310-21.
5. Une vaste enquête en 2008 auprès des participants au Test de Lecture mensuel Prescrire. Rev Prescr 2008;28:955.
6. Chapeau ! [Editorial] Rev Prescr 2009;29:881.