Revue d'Evidence-Based Medicine



Hypertension : les pharmaciens dans l’engrenage thérapeutique



Minerva 2010 Volume 9 Numéro 1 Page 1 - 1

Professions de santé


L’optimalisation de la prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaires dans une population est une priorité de santé publique, mais la tâche est loin d’être terminée. La gestion de l’hypertension en est un bon exemple : seule une personne à haut risque sur trois atteint les valeurs cibles de pression artérielle et pour des groupes spécifiques, tels les diabétiques et les insuffisants rénaux, le pourcentage est encore moindre (1).

Ce domaine représente un défi important pour la première ligne de soins, étant donné que l’optimalisation de la prévention cardiovasculaire est et reste une de ses missions spécifiques.

Une évolution vers une collaboration davantage multidisciplinaire est la réponse adéquate pour mener cette tâche à bonne fin. Vient le temps de la concertation, du partage des tâches et des responsabilités. Les pharmaciens sont des collaborateurs idéaux, c’est ce que la littérature nous apprend (2,3) pour autant que dans la pratique quotidienne ils fassent preuve de leur compétence (par exemple leur connaissance des guides de pratique en vigueur), de leur bonne volonté pour un partage des responsabilités et d’un apport réel. La formation continuée et la concertation interdisciplinaire (médico-pharmaceutique) sont d’autres conditions à remplir. Il devient donc indispensable que les tâches du pharmacien soient complétées, après consensus. Une publication récente dans le BMJ montre une efficacité de l’accompagnement de patients hypertendus par des pharmaciens américains (4). Les patients (n=778) bénéficiant de cet accompagnement complémentaire ont montré 1,74 plus de chance d’atteindre une pression artérielle normale par rapport à ceux traités de manière courante (p<0,001). Le rôle plus étendu du pharmacien comportait des informations téléphoniques, une collecte (par internet) et une interprétation des mesures de pression réalisées au domicile. Ce protocole n’est pas extrapolable comme tel dans la situation belge – l’interprétation de données cliniques restant la responsabilité du médecin – mais dans le contexte d’options modernes de prise en charge du patient hypertendu, cette étude est source d’inspiration.

Dans ce cadre, nous songeons en premier lieu au document de consensus concernant la standardisation et la réalisation de l’automesure de la pression artérielle au domicile, publié dans les régions francophones et néerlandophones de Belgique, cosigné par tous les acteurs de terrain : le Comité Belge de lutte contre l’hypertension artérielle, la SSMG, Domus Medica, la Ligue Cardiologique Belge et l’APB (5,6). La procédure de mesure de la pression artérielle décrite dans ce document correspond aux mentions figurant dans le document « Recommandation de Bonne Pratique. Hypertension » de la SSMG mis à jour et de parution imminente. L’intérêt majeur d’une mesure de la pression artérielle au domicile occupe une place centrale, tant pour le diagnostic que dans la mise au point et le suivi du patient hypertendu. Ceci exige, pour être optimal, une implication de tous les travailleurs de la santé et un bon accord entre eux.

Les médecins généralistes, leurs assistants, les médecins spécialistes, les infirmières, les pharmaciens, les mutualités et les autorités sont conscients de la nécessité d’une politique de soins innovante pour les maladies chroniques, basée sur les données de l’EBM, avec description claire de la contribution de chaque dispensateur de soins et avec une rémunération en fonction de la qualité délivrée. Les trajets de soins « insuffisance rénale chronique » et « diabète de type 2 » en sont des prémices louables. Prévoir d’emblée un accompagnement et une évaluation scientifiques de tels projets est logique : évaluation du processus (déroulement, pièges, conditions de mise en application présentes et absentes), balance coût/efficacité dans la pratique documentée par des données de morbi-mortalité, de qualité de vie. Cette évaluation nécessite une enquête qui doit être initiée en même temps que les projets de soins avec les moyens organisationnels et budgétaires requis.

 

Références

  1. Fagard RH, Van Den Enden M, Leeman M, Warling X. Survey on treatment of hypertension and implementation of World Health Organization/International Society of Hypertension risk stratification in primary care in Belgium. J Hypertension 2002;20:1297-302.
  2. Laekeman G, De Cort P. Le pharmacien et les soins dispensés au patient. [Editorial] MinervaF 2007;6(2):17.
  3. Laekeman G. Suivi téléphonique du pharmacien améliorant la survie ? MinervaF 2007;6(5):78-80.
  4. Green BB, Cook AJ, Ralston JD, et al. Effectiveness of home blood pressure monitoring, Web communication, and pharmacist care on hypertension control: a randomized controlled trial. JAMA 2008;299:2857-67.
  5. Persu A, Fagard R, De Cort P, et al. Du bon usage de l’automesure tensionnelle, document de consensus. Louvain Médical 2008;8:305-9.
  6. Persu A, Fagard R, De Cort P, et al. Over het goed gebruik van thuisbloeddrukmeting. Consensusdocument. Tijdschr Geneeskd 2009, 65; 109-12.
Hypertension : les pharmaciens dans l’engrenage thérapeutique

Auteurs

De Cort P.
em. Huisartsgeneeskunde, KU Leuven
COI :

De Jonghe M.
médecin généraliste, Centre Académique de Médecine Générale, UCLouvain
COI :

Laekeman G.
em. Klinische Farmacologie en Farmacotherapie, KU Leuven
COI :

Glossaire

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