Revue d'Evidence-Based Medicine
Contrôle du diabète de type 2 : quoi de neuf pour la pratique ?
Le diabète de type 2 est une pathologie fréquente : près de 400 000 belges prennent des antidiabétiques oraux. Cette pathologie fait l’objet de très nombreuses publications, analysées dans Minerva si elles concernent la première ligne de soins. Plusieurs publications récentes évaluent des aspects essentiels pour la pratique : l’autocontrôle, les cibles en HbA1C, le bénéfice des différents types de traitement en termes de prévention d’événements cardiovasculaires, particulièrement à long terme pour le contrôle du diabète et de la pression artérielle, l’intérêt de la metformine pour traiter le diabète de grossesse. Nous avons rassemblé ces différentes analyses d’articles dans ce numéro en les remettant en perspective avec les connaissances et directives actuelles.
Observation
Nous avons précédemment commenté (1) l’étude Steno2 qui inclut 315 patients avec un diabète de type 2 et une microalbuminurie persistante ; sur 7,8 ans de suivi moyen, cette étude montrait l’intérêt d’un traitement intensif du diabète (HbA1C cible <6,5% versus <7,5%, puis aussi <6,5% dans le groupe contrôle pour les 3 dernières années) associé à une prise en charge plus stricte avec valeurs cibles pour d’autres facteurs de risque cardiovasculaire, versus traitement habituel. Elle rapportait une diminution d’incidence des événements cardiovasculaires sous traitement intensif et multicible. Nous avons aussi analysé l’étude d’observation qui suivait cette RCT (2), pour 6 années supplémentaires. La plus-value préventive du traitement intensif continuait à se vérifier.
Retenons que c’est la prise en charge simultanée des principaux facteurs de risque cardiovasculaire (y compris mais pas exclusivement le diabète) qui montre une efficacité cardiovasculaire préventive, avec effet persistant, en cas de diabète de type 2.
La même succession de publications (RCT puis observation) vous est présentée dans ce numéro. Les études UKPDS montraient, sur 10 ans, un bénéfice significatif de traitements intensifs (sans viser une HbA1C < 7%) avec des sulfonylurées, metformine et insulines pour la prévention des complications microvasculaires et non significatif pour l’infarctus du myocarde, sauf pour la metformine pour laquelle le résultat était significatif. Nous présentons ici les résultats d’une étude d’observation sur 10 nouvelles années après ces RCTs : malgré la perte d’une différence en HbA1C entre les groupes traitement intensif et traitement habituel, la plus-value du traitement intensif persiste pour la prévention microvasculaire et apparaît pour la prévention macrovasculaire.
Retenons que le bénéfice cardiovasculaire préventif à plus long terme (10 ans de plus) d’un meilleur contrôle glycémique pendant les 10 premières années (HbA1C 7,0%) est significatif versus contrôle moins strict (HbA1C 7,9%), ainsi que l’intérêt d’un traitement précoce.
Une publication parallèle de suivi des études UKPDS centré sur le traitement de l’hypertension artérielle vous est également présentée : dans ce cas, l’arrêt d’un traitement antihypertenseur intensif annule le bénéfice préalablement acquis.
Autocontrôle
Soulever le problème d’un traitement intensif du diabète est souvent synonyme d’évoquer un autocontrôle. Nous analysons aussi dans ce numéro une RCT évaluant l’intérêt d’un autocontrôle chez des patients avec un diabète de type 2 récemment diagnostiqué mais mal équilibré, sans insulinothérapie. Un bénéfice, précédemment suggéré par des études d’observation en termes de réduction de la mortalité sur 5 à 10 ans, n’est pas montré en termes d’équilibre glycémique. Par contre, des doutes sont soulevés pour la qualité de vie.
Retenons l’absence de preuve d’un autocontrôle systématique du diabète de type 2, sans insulinothérapie, sur l’équilibre glycémique.
Metformine et grossesse
L’intérêt de la metformine comme traitement du diabète de grossesse, avec ou sans insuline, est également abordé : une RCT récente demande confirmation, dans le cadre des interrogations actuellement posées quant au bénéfice du dépistage et du traitement du diabète de grossesse.
HbA1C cible
Nous vous présentons aussi les résultats de la RCT VADT, troisième pilier des études comparant un traitement très intensif (HbA1C ≤ 6,5%) à un traitement moins intensif. Nous vous avions déjà présenté les résultats de l’étude ADVANCE montrant chez des patients diabétiques type 2 un bénéfice, sur 8 ans, d’un traitement intensif (HbA1C ≤ 6,5%) versus consensus local (HbA1C moyenne 7,3% atteinte) pour la prévention des événements cardiovasculaires mais en fait uniquement pour la néphropathie (3). Nous présentions en même temps, les résultats de l’étude ACCORD, dans le même type de population, étude avec arrêt prématuré du bras traitement intensif (HbA1C cible < 6%) versus traitement de référence (HbA1C cible 7,0 à 7,9%) pour surmortalité ; les résultats ne montrent pas de différence entre les 2 groupes pour un critère composite (infarctus du myocarde non fatal, AVC non fatal). L’étude VADT, incluant des patients (vétérans) diabétiques dont les autres facteurs de risque cardiovasculaire sont bien pris en charge, ne montre également pas l’intérêt d’un traitement ciblant une HbA1C beaucoup plus basse que 7%. Une méta-analyse récente montre l’intérêt d’un contrôle plus intensif de la glycémie mais sans donner de cible d’HbA1C ni d’éléments appropriés pour des catégories particulières de patients. Basée sur les données brutes des précédentes RCTs et non sur des données individuelles, elle n’apporte pas d’élément neuf.
Retenons que nous ne disposons pas de preuve de l’intérêt de viser une HbA1C beaucoup plus basse que 7% chez des diabétiques de type 2 avec d’autres risques cardiovasculaires ; proposer un seuil plus bas ou plus haut pour certaines catégories de diabétiques est l’orientation de certains consensus récents (4) mais ne repose pas sur des preuves.
Références
- Sunaert P, Feyen L. L'étude Steno-2: prise en charge mulitfactorielle du diabète de type 2. MinervaF 2004;3(2):29-32.
- Wens J. Efficacité d’une prise en charge multifactorielle du diabète en termes de mortalité. MinervaF 2008;7(8):122-3.
- Chevalier P, Wens J. Intensité du contrôle glycémique et risque cardio-(micro et macro)vasculaire. MinervaF 2008;7(8):124-5.
- Skyler JS, Bergenstal R, Bonow RO, et al; American Diabetes Association; American College of Cardiology Foundation; American Heart Association. Intensive glycemic control and the prevention of cardiovascular events: implications of the ACCORD, ADVANCE, and VA diabetes trials: a position statement of the American Diabetes Association and a scientific statement of the American College of Cardiology Foundation and the American Heart Association. Diabetes Care 2009;32:187-92.
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