Revue d'Evidence-Based Medicine



Faut-il demander une radiographie en cas de lombalgie?



Minerva 2003 Volume 2 Numéro 3 Page 50 - 51

Professions de santé


Analyse de
Kendrick D, Fielding K, Bentley E, et al. Radiography of the lumbar spine in primary care patients with low back pain: randomised controlled trial. BMJ 2001;322:400-5.


Conclusion
Cette étude, en pratique générale, montre qu’une radiographie pratiquée chez des patients lombalgiques (depuis au moins 6 semaines) ne conduit pas à un meilleur fonctionnement, à une diminution la douleur ou à une amélioration de l’état général de santé du patient. Le praticien doit tenir compte de l’effet somatisant d’un examen technique “banal” comme la radiographie. Une conduite adéquate de la consultation et une expérience des méthodes de communication sont préférables pour une augmentation de la satisfaction du patient (lombalgique) à un recours à un examen technique complémentaire tel que la radiographie.


 

Minerva « en bref » vous propose de brefs commentaires sur des publications sélectionnées par le comité de rédaction de Minerva. Des études intéressantes et pertinentes pour les médecins généralistes qui ne doivent pas ou ne peuvent pas être discutées dans un cadre plus large trouvent leur place dans cette rubrique. Chaque sélection est brièvement résumée et accompagnée de quelques commentaires faits par un référent. La rédaction de Minerva vous en souhaite une agréable lecture.

 

Résumé

Un patient souffrant de lombalgie est-il plus rapidement soulagé et plus satisfait s’il bénéficie d’une radiographie ? Une radiographie réalisée en tant que procédure diagnostique a-t-elle une répercussion “thérapeutique” comme bénéfice secondaire ? Une RCT importante a été menée au Royaume Uni pour répondre à cette question. Sont inclus dans celle-ci 421 patients, issus de 52 pratiques de médecine familiale ; 210 dans le groupe intervention (radiographie) et 211 dans le groupe placebo (pas de radiographie). Les patients sont âgés de 20 à 55 ans et présentent un épisode de lombalgie d’au moins 6 semaines et de 6 mois maximum (médiane de 10 semaines). Les patients reçoivent des “soins habituels” et sont répartis de manière identique dans 2 groupes. L’étude n’est pas en aveugle. Les scores sont évalués après 3 et 9 mois sur différentes échelles qui explorent la douleur, l’impact de la lombalgie sur, entre autres, le grade de dysfonctionnement et la satisfaction vis-à-vis de la prise en charge. Le groupe intervention paraît présenter plus de lombalgies après 3 mois (RR 1,26 – IC à 95%: 1,00-1,60) mais plus de satisfaction vis-à-vis de la prise en charge après 9 mois.

 

Discussion

Il n’est pas judicieux de demander une radiographie de routine chez les patients présentant une lombalgie aspécifique. Il est en effet connu que celle-ci n’influence pas la gestion du problème. En cas de lombalgie, une radiographie est uniquement indiquée en cas d’impression (rare) de non congruence des arguments par le médecin 1. En tant que médecin, une radiographie ne nous avance guère. Mais vous êtes vous déjà interrogés sur le bénéfice pour le patient ? En d’autres mots, une radiographie de la colonne lombaire a-t-elle plus de sens pour le patient que pour le médecin ? Cette étude porte, pour la première fois à grande échelle, sur cette question. Elle se déroule entièrement en pratique générale et est parfaitement transposable dans la réalité belge. La prise en charge des lombalgies semble en effet peu divergente dans les différents pays occidentaux ayant une première ligne de soins bien structurée 2.

Les patients du groupe intervention ont mentionné plus de lombalgies après 3 mois. Les auteurs expliquent ce fait par l’assertion de l’effet de somatisation possible, à court terme, d’une radiographie, pouvant diminuer le seuil de plaintes somatiques. Comme les procédures thérapeutiques étaient réparties de manière égale dans les 2 groupes, nous ne pouvons y trouver l’explication du fait que les patients du groupe intervention se disent plus satisfaits, après 9 mois, de la prise en charge. La différence au fil des mois est-elle liée à la radiographie effectuée auparavant ? Les auteurs suggèrent que le “diagnostic” posé par un protocole radiologique donne au patient une étiquette rassurante qui serait responsable d’une meilleure satisfaction pour lui à long terme. Cette explication méconnaît l’attitude du médecin et son approche du patient lombalgique. Cette approche est idéalement multi-axiale et nécessite une prise en charge explorant l’abord biopsychosocial 3. Celui-ci sondera les attentes du patient (entre autres son désir ou non de radiographie) et son vécu. Lors de l’élaboration du plan thérapeutique, la communication d’informations, particulièrement en prévention d’un dysfonctionnement persistant, est très importante. Une approche multidisciplinaire de la lombalgie persistant plus longtemps est efficace 4. La satisfaction du patient est liée à ces différents facteurs, employés très différemment de médecin à médecin. Ceci pourrait également expliquer la satisfaction du patient après 9 mois.

 

Conclusion

Cette étude, en pratique générale, montre qu’une radiographie pratiquée chez des patients lombalgiques (depuis au moins 6 semaines) ne conduit pas à un meilleur fonctionnement, à une diminution la douleur ou à une amélioration de l’état général de santé du patient. Le praticien doit tenir compte de l’effet somatisant d’un examen technique “banal” comme la radiographie. Une conduite adéquate de la consultation et une expérience des méthodes de communication sont préférables pour une augmentation de la satisfaction du patient (lombalgique) à un recours à un examen technique complémentaire tel que la radiographie.

 

Conflits d’intérêt/financement

Cette étude est financée par le “N H S Research and Development Assessment Programme” (U.K.). Aucun conflit d’intérêt n’est mentionné.

 

Références

  1. Faas A, Chavannes AW, Koes BW, et al. NHG-Standaard Lage-Rugpijn. Huisarts Wet 1996;39:18-30.
  2. Koes BW, Van Tulder MW. Het beleid bij lage-rugpijn. Huisarts Wet 1998;41:57-61.
  3. Grundmeijer HGLM, Reenders K, Rutten GEHM. Hoofdstuk 1. De Klacht. In: Het Geneeskundig Proces. Elsevier/ Bunge, 1999.
  4. Guzman J, Esmail R, Karjalainen K, et al. Multidisciplinary rehabilitation for chronic low back pain: systematic review. BMJ 2001;322:1511-6.
 
Faut-il demander une radiographie en cas de lombalgie?

Auteurs

De Wachter J.

COI :

Mots-clés

lombalgie, radiographie

Glossaire

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