Analyse


Diabète de type 2 chez la personne âgée : insuline NPH ou glargine ?


28 08 2012

Professions de santé

Analyse de
Lee P, Chang A, Blaum C, et al. Comparison of safety and efficacy of insulin glargine and Neutral Protamine Hagedorn insulin in older adults with type 2 diabetes mellitus: results from a pooled analysis. J Am Geriatr Soc 2012;60:51-9.


Conclusion
Cette synthèse narrative de 5 RCTs sponsorisées par la firme commercialisant l’insuline glargine montre un avantage statistique de celle-ci versus insuline NPH chez des personnes âgées dont le diabète de type 2 est insuffisamment équilibré sous antidiabétiques oraux. Elle montre une moindre incidence, sous glargine, d’hypoglycémies nocturnes et nocturnes sévères, de pertinence clinique cependant faible. Cet avantage en efficacité sur l’HbA1c et en termes d’hypoglycémies sévères (toutes) n’est pas confirmé dans une synthèse systématique plus ancienne, plus large. Le rapport coût/utilité reste prohibitif versus insuline NPH.



Texte publié sous la responsabilité de la rédaction francophone

 

Nous avons déjà analysé dans Minerva les résultats de l’étude 4-T Study Group à 1 an (1) et 3 ans (2) évaluant l’intérêt de différents schémas insuliniques en ajout à un traitement antidiabétique oral devenu insuffisant pour assurer l’équilibre glycémique d’un patient présentant un diabète de type 2. Cette étude incluait 3 bras : insuline aspart biphasique (n=235), insuline aspart prandiale 3 fois par jour (n=239) et insuline détémir basale 1 (ou 2) fois par jour (n=234), donc 3 schémas avec analogues insuliniques… sans comparaison avec l’insuline NPH qui reste le traitement de référence (3).

Selon notre analyse (4,5), l’ajout d’analogues d’insuline à la metformine et à un sulfamidé hypoglycémiant en cas de contrôle insuffisant d’un diabète de type 2 permet de diminuer significativement le taux d’HbA1c. Seule une minorité de patients atteignent les valeurs cibles d’HbA1c (= 6,5%) à un an. A 3 ans, aucune différence n’est observée entre les schémas utilisés mais un schéma insulinique basal provoque moins d’hypoglycémies et de prise de poids.

Une comparaison entre un analogue insulinique à longue durée d’action (glargine (Lantus®) ou détémir (Levemir®)) et insuline NPH manquait donc dans cette étude. Comme nous l’avions mentionné dans Minerva (6), une évaluation des technologies médicales et des médicaments (Health Technology Assessment - HTA) (7) effectuée au Royaume-Uni estimait que le surcoût (coût incrémentiel) des analogues insuliniques à longue durée d’action versus insuline NPH par rapport à la plus-value thérapeutique exprimée en QALY (en fait quelques hypoglycémies nocturnes en moins (8)) était énorme : pour la glargine ICER de 318.000 à 364.000 euro par QALY et pour la détémir de 213.000 à 468.000 euro.

 

Une synthèse de 5 RCTs (sponsorisées par la firme commercialisant l’insuline glargine), de dessin similaire, comparant directement insuline NPH et insuline glargine chez des patients présentant un diabète de type 2 est publiée en ce début 2012 par Lee et coll. (9). Les sujets inclus sont âgés ≤ 80 ans (604 ≥ 65 ans, 2 091 < 65 ans), avec IMC ≤ 40 kg/m², HbA1c de 7,5 à 12% sous antidiabétiques oraux (ADO) et reçoivent en plus des ADO, soit de l’insuline glargine (n=1 441) soit de l’insuline NPH (n=1 254) durant 24 à 28 semaines. L’étude ne montre pas de différence significative pour la diminution de l’HbA1c ou de la glycémie à jeun entre les 2 traitements en modèle d’effets aléatoires. A noter de meilleurs résultats, statistiquement significatifs, pour les sujets ≥ 65 ans, mais non < 65 ans, en faveur de l’insuline glargine, liés à une moindre efficacité de l’insuline NPH après 65 ans, mais la différence est de -0,4% versus valeur initiale, soit inférieure au seuil de variabilité inter- laboratoires (0,5%). Aucune différence n’est observée pour les hypoglycémies diurnes sévères ou non. Une incidence moindre d’hypoglycémies nocturnes symptomatiques est observée (20% vers 34% ; OR de 0,61 avec IC à 95% de 0,42 à 0,89). Une incidence moindre d’hypoglycémies nocturnes sévères est observée (0,8% vers 2,2% ; OR de 0,38 avec IC à 95% de 0,19 à 0,77), ce qui correspond à 0,03 et 0,08 hypoglycémies nocturnes sévères par personne par an.

Une méta-analyse plus systématique sur le même sujet, effectuée en 2008 (10) avait identifié 12 RCTs (n=4 385) et ne montrait pas de différence significative pour la modification d’HbA1c ni pour les hypoglycémies sévères, et un moindre gain de poids sous NPH.   

 

Conclusion

Cette synthèse narrative de 5 RCTs sponsorisées par la firme commercialisant l’insuline glargine montre un avantage statistique de celle-ci versus insuline NPH chez des personnes âgées dont le diabète de type 2 est insuffisamment équilibré sous antidiabétiques oraux. Elle montre une moindre incidence, sous glargine, d’hypoglycémies nocturnes et nocturnes sévères, de pertinence clinique cependant faible. Cet avantage en efficacité sur l’HbA1c et en termes d’hypoglycémies sévères (toutes) n’est pas confirmé dans une synthèse systématique plus ancienne, plus large. Le rapport coût/utilité reste prohibitif versus insuline NPH.

 

 

Références

  1. Holman RR, Thorne KI, Farmer AJ, et al; 4-T Study Group. Addition of biphasic, prandial, or basal insulin to oral therapy in type 2 diabetes. N Engl J Med 2007;357:1716-30.
  2. Holman RR, Farmer AJ, Davies MJ, et al; 4-T Study Group. Three-year efficacy of complex insulin regimens in type 2 diabetes. N Engl J Med 2009;361:1736-47.
  3. Wens J, Sunaert P, Nobels F, et al. Recommandation de Bonne Pratique : Diabète de type 2; SSMG 2007.
  4. Van Crombrugge P. Quel schéma insulinique initial pour un diabète de type 2 ? MinervaF 2008;7(6):88-9.
  5. Van Crombrugge P. Quel schéma insulinique initier pour un diabète de type 2 ? MinervaF 2010;9(5):54-5.
  6. Chevalier P. Efficacité, utilité, utilité relative et efficience. MinervaF 2011;10(3):38.
  7. Waugh N, Cummins E, Royle P, et al. Newer agents for blood glucose control in type 2 diabetes: systematic review and economic evaluation. Health Technol Assess 2010;14:1-248.
  8. Fiche de Transparence Prise en charge du diabète de type 2. Janvier 2008. www.cbip.be
  9. Lee P, Chang A, Blaum C, et al. Comparison of safety and efficacy of insulin glargine and Neutral Protamine Hagedorn insulin in older adults with type 2 diabetes mellitus: results from a pooled analysis. J Am Geriatr Soc 2012;60:51-9.
  10. Bazzano LA, Lee LJ, Shi L, et al.Safety and efficacy of glargine compared with NPH insulin for the treatment of type 2 diabetes: a meta‐analysis of randomized controlled trials. Diabet Med 2008;25:924-32.
Diabète de type 2 chez la personne âgée : insuline NPH ou glargine ?

Auteurs

Chevalier P.
médecin généraliste
COI :

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