Analyse


Est-il vraiment possible de réduire le nombre de consultations et l’usage des antibiotiques dans les infections aiguës des voies respiratoires chez l'enfant ?


28 10 2012

Professions de santé

Analyse de
Andrews T, Thompson M, Buckley DI, et al. Interventions to influence consulting and antibiotic use for acute respiratory tract infections in children: a systematic review and meta-analysis. PLoS One 2012;7:e30334.


Conclusion
La non prescription ou la remise d’une prescription différée s’avère une mesure efficace pour optimiser l'usage des antibiotiques dans les infections respiratoires chez l'enfant. Cette stratégie, accompagnée d’une information écrite (interpellant également les enfants), est susceptible d’améliorer le comportement de consultation.



Texte et traduction sous la responsabilité de la rédaction néerlandophone

 

Auparavant, nous avons déjà abordé dans Minerva (1), à partir d’un RCT de bonne qualité (2), l’efficacité de trois stratégies de prescription différentes (prescription d’antibiotiques d’emblée, prescription différée ou pas d’antibiotiques prescrits) accompagnées d’un dépliant informatif, sur la durée et sur la sévérité des symptômes en cas d’infection respiratoire inférieure. Cette étude, réalisée en médecine générale, a montré que le fait de ne pas prescrire d’antibiotiques ou de donner une prescription différée aux patients présentant de la toux et des plaintes des voies respiratoires inférieures (entre autres fièvre et crachats colorés), mais sans pneumonie ou affection pulmonaire chronique, n’a pas d’influence sur la durée et sur la sévérité des symptômes. Dans l’étude analysée ici, les auteurs ont évalué l’efficacité des différentes stratégies de prescription aussi bien chez l'enfant et l'adulte que chez la personne âgée. La majorité des consultations pour infection respiratoire concernent des parents qui consultent avec leurs (jeunes) enfants, phénomène qui se produit d’ailleurs également au cabinet du généraliste flamand (www.intego.be). C'est pourquoi il est utile de savoir si les interventions étudiées sont également efficaces au sein de ce groupe pertinent de patients, pour optimiser non seulement l'usage des antibiotiques, mais aussi le comportement de consultation. Il est en effet connu que la prescription d'antibiotiques pour certains symptômes tels que la toux ou le mal de gorge, incitent les patients à reconsulter ultérieurement pour ce genre de plaintes, tandis que celles-ci sont en général la conséquence d'une affection qui évolue spontanément de façon favorable.

En 2012 parut une synthèse méthodique avec méta-analyse qui a évalué l'efficacité d'interventions auprès des parents ou des soignants sur la consultation et l'usage des antibiotiques dans les infections aiguës des voies respiratoires chez l'enfant en soins primaires (3). Les principaux critères de jugement furent le comportement de consultation et les connaissances des parents, et la proportion d'enfants prenant ensuite des antibiotiques. 23 études (20 interventions) des 5 714 références répondaient aux critères d'inclusion. Le matériel développé pour interpeller tant les parents que les enfants, fut efficace pour modifier les connaissances et le comportement des parents, avec conséquemment une réduction de 13% à 40% du nombre de consultations. L’optimisation de la consultation semblait plus simple à mettre en place pour certaines plaintes (le mal de gorge par exemple) que pour d'autres (la toux par exemple). La prescription différée remise aux parents a également permis de réduire de manière considérable l'usage d'antibiotiques (risque relatif (RR) de 0,46 (IC à 95% de 0,40 à 0,54)). De plus, la non prescription ou la remise d’une prescription différée, n’a pas diminué la satisfaction des parents.

Ce résultat, notamment que les informations ciblées sur certains symptômes spécifiques sont plus utiles aux parents qu'une approche moins ciblée, rejoint les observations de la synthèse de Glascoe et coll. concernant des interventions incluant une éducation en matière de santé axée sur les parents (4). Ce fut aussi l’objectif des dépliants informatifs pour patients distribués aux médecins généralistes, pédiatres et pharmaciens dans le cadre de la dernière campagne nationale pour un meilleur usage des antibiotiques (www.usagecorrectantibiotiques.be). La non prescription ou la remise d’une prescription différée semble être une mesure efficace et sans risques pour réduire l'usage des antibiotiques. C’est ce que montre tant l’étude analysée précédemment dans Minerva (1,2) que les synthèses méthodiques y relatives comme celle d’Arroll et coll. (5). En Flandre, comme l’évoquent aussi bien une étude européenne (5) que les projets de thèses en médecine générale (www.icho.be), il est probable que la prescription différée soit peu utilisée. Cependant, le peu de matériel suggère qu'il s'agit, aussi dans notre contexte, d'une stratégie utile pour réduire l'usage des antibiotiques, permettant également aux prescripteurs et aux patients de se rendre compte que les infections respiratoires sont en général des affections qui évoluent spontanément de façon favorable. Il nous serait ainsi possible de briser le cercle vicieux des consultations et de l'usage des antibiotiques pour infections respiratoires. 

 

Conclusion

La non prescription ou la remise d’une prescription différée s’avère une mesure efficace pour optimiser l'usage des antibiotiques dans les infections respiratoires chez l'enfant. Cette stratégie, accompagnée d’une information écrite (interpellant également les enfants), est susceptible d’améliorer le comportement de consultation.

 

Références

  1. Coenen S, van Driel M. Antibiotiques en cas d’infection respiratoire inférieure: prescription immédiate, différée ou absente? MinervaF 2006;5(5):77-8.
  2. Little P, Rumsby K, Kelly J, et al. Information leaflet and antibiotic prescribing strategies for acute lower respiratory tract infection: a randomized controlled trial. JAMA 2005;293:3029-35.
  3. Andrews T, Thompson M, Buckley DI, et al. Interventions to influence consulting and antibiotic use for acute respiratory tract infections in children: a systematic review and meta-analysis. PLoS One 2012;7:e30334.
  4. Glascoe F, Oberklaid F, Dworkin P, Trimm F. Brief approaches to educating patients and parents in primary care. Pediatrics 1998;101:E10.
  5. Arroll B, Kenealy T, Kerse N. Do delayed prescriptions reduce antibiotic use in respiratory tract infections? A systematic review. Br J Gen Pract 2003;53:871-7.
Est-il vraiment possible de réduire le nombre de consultations et l’usage des antibiotiques dans les infections aiguës des voies respiratoires chez l''enfant ?

Auteurs

Coenen S.
Centrum voor Huisartsgeneeskunde, Eerstelijns- en Interdisciplinaire Zorg (ELIZA), en Labo Medische Microbiologie, Vaccinatie- en Infectieziekten Instituut (VAXINFECTIO), Universiteit Antwerpen
COI :

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