Analyse


AVC ou AIT : AAS + dipyridamole (suite) ?


27 09 2010

Professions de santé

Analyse de
Dengler R, Diener HC, Schwartz A, et al for the EARLY investigators. Early treatment with aspirin plus extended-release dipyridamole for transient ischaemic attack or ischaemic stroke within 24 h of symptom onset (EARLY trial): a randomised, open-label, blinded-endpoint trial. Lancet Neurol 2010;9:159-66.


Conclusion
Cette RCT ne montre pas de bénéfice en termes de capacités fonctionnelles post AVC d’une administration précoce d’une association dipyridamole + aspirine versus aspirine seule pendant 7 jours, suivie d’une administration de l’association à tous les patients. En l’absence de groupe recevant de l’aspirine seule (à plus de 50 mg par jour) après les 7 jours, il est toujours aussi difficile de préciser un avantage certain de l’association versus aspirine seule.


 


La revue Minerva a déjà plusieurs fois analysé des RCTs et méta-analyses évaluant l’intérêt du dipyridamole associé à l’aspirine post accident vasculaire cérébral (AVC). Pour rappel, l’importante RCT ESPRIT (1) montrait que l’ajout de dipyridamole à libération prolongée à l’aspirine pouvait apporter un bénéfice complémentaire à un nombre probablement restreint de patients ayant présenté un AVC mineur ou un AIT, en termes de morbidité cardiovasculaire mais pas en termes de mortalité cardiovasculaire ni de mortalité totale. Cette étude était cependant en protocole ouvert et l’absence de prise en compte des traitements associés rendait également ses conclusions plus fragiles (2).

Les auteurs de cette RCT incluaient dans leur publication une méta-analyse de toutes les études aspirine + dipyridamole versus aspirine post ischémie cérébrale présumée d’origine artérielle. Cette méta-analyse montrait un effet favorable de l’association versus aspirine seule sur un critère composite (survenue de décès d’origine vasculaire, accident vasculaire cérébral non fatal ou infarctus du myocarde non fatal : Risk Ratio 0,82 (IC à 95% de 0,74 à 0,91)) mais sans bénéfice significatif en termes de mortalité de toute cause ou liée à une cause vasculaire, avec des doses faibles ou variables d’aspirine (2 x 25 mg par jour ou de 30 à 325 mg (moyenne de 75 mg)).

Les mêmes auteurs ont ensuite publié une nouvelle méta-analyse, sur données individuelles (3) en fonction de sous-groupes de risque. Celle-ci ne montrait pas de supériorité de l’association dipyridamole + AAS versus AAS seule post AVC dans tous les sous-groupes déterminés et ne remettait pas en cause les précédentes réserves pour une ample plus-value dans l’ensemble de cette population post AIT ou AVC mineur (4).

Une autre RCT (5), également analysée dans Minerva (6), ne montrait pas de non infériorité de l’association de 25 mg d’aspirine avec 200 mg de dipyridamole à libération modifiée BID versus 75 mg de clopidogrel QD en prévention de la récidive d’un AVC, sans faire de comparaison versus aspirine en monothérapie.

Une nouvelle RCT (7) évalue si une administration précoce (dans les 24 heures de début des symptômes) chez des patients avec un score NIHSS entre 5 et 20 pendant 7 jours d’une association de dipyridamole à libération prolongée (200 mg 2x/j) à de l’aspirine (2 x 25 mg/j) (n=278) est non inférieure à celle d’aspirine (100 mg/j) (n=270), les patients recevant tous après 7 jours, en ouvert, une association d’aspirine et de dipyridamole. Les patients avec hémorragie intracrânienne visualisée au CT scan ou thrombolysés étaient exclus. Les auteurs concluent que l’administration plus précoce de l’association dipyridamole + aspirine est probablement aussi sûre et efficace que l’administration d’aspirine. La différence absolue pour le critère primaire (score de Rankin modifié enregistré par téléphone au jour 90) est de 4,1% en faveur de l’association mais avec un intervalle de confiance de -4,5 à 12,6. Cette étude montre aussi, quel que soit le traitement, le risque significatif de récidive ou de survenue d’infarctus du myocarde dans les 90 jours post AVC ou AIT. Les auteurs somment les résultats de leur étude avec ceux de l’étude FASTER (8) évaluant l’association clopidogrel + aspirine versus aspirine seule, étude ne montrant pas non plus d’avantage statistiquement significatif en faveur d’une association (mais avec risque hémorragique intracrânien et extracrânien accru sous association). Si la sommation des 2 études montre un avantage significatif en faveur d’une association versus aspirine seule, l’hétérogénéité des traitements ne permet aucune conclusion utile pour le praticien.

 

Conclusion

Cette RCT ne montre pas de bénéfice en termes de capacités fonctionnelles post AVC dans cette étude-ci) d’une administration précoce d’une association dipyridamole + aspirine versus aspirine seule pendant 7 jours, suivie d’une administration de l’association à tous les patients. En l’absence de groupe recevant de l’aspirine seule (à plus de 50 mg par jour) après les 7 jours, il est toujours aussi difficile de préciser un avantage certain de l’association versus aspirine seule.

 

 

Références

  1. Halkes PH, van Gijn J, Kappelle LJ, et al for the ESPRIT Study Group. Aspirin plus dipyridamole versus aspirin alone after cerebral ischaemia of arterial origin (ESPRIT): randomised controlled trial. Lancet 2006;367:1665-73.
  2. Chevalier P. Associer du dipyridamole à l’aspirine post événement ischémique cérébral ?
    MinervaF 2006;5(8):114-6.
  3. Halkes PH, Gray LJ, Bath PM, et al. Dipyridamole plus aspirin versus aspirin alone in secondary prevention after TIA or stroke: a meta-analysis by risk. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2008;79:1218-23.
  4. Chevalier P. Dipyridamole et aspirine post AIT ou AVC. MinervaF 2009;8(6):83.
  5. Sacco RL, Diener HC, Yusuf S, et al; PRoFESS Study Group. Aspirin and extended-release dipyridamole versus clopidogrel for recurrent stroke. N Engl J Med 2008;359:1238-51.
  6. Bogaert M., Kaufman L. Clopidogrel ou aspirine + dipyridamole post AVC ? MinervaF 2009;8(6):72-3.
  7. Dengler R, Diener HC, Schwartz A, et al for the EARLY investigators. Early treatment with aspirin plus extended-release dipyridamole for transient ischaemic attack or ischaemic stroke within 24 h of symptom onset (EARLY trial): a randomised, open-label, blinded-endpoint trial. Lancet Neurol 2010;9:159-66.
  8. Kennedy J, Hill MD, Ryckborst KJ, et al, FASTER investigators. Fast assessment of stroke and transient ischaemic attack to prevent early recurrence (FASTER): a randomized controlled pilot trial. Lancet Neurol 2007;6:961-9.
AVC ou AIT : AAS + dipyridamole (suite) ?



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