Analyse


La psychothérapie est-elle efficace pour le traitement de la dépression en première ligne de soins ?


15 07 2015

Professions de santé

Analyse de
Linde K, Sigterman K, Kriston L, et al. Effectiveness of psychological treatments for depressive disorders in primary care: systematic review and meta-analysis. Ann Fam Med 2015;13:56-68.


Conclusion
Cette méta-analyse confirme l’efficacité de la psychothérapie pour le traitement de la dépression sévère en première ligne de soins. Elle ajoute prudemment que la préférence du patient pour un mode d’approche psychothérapeutique déterminé jouerait peut-être un rôle dans le degré d’efficacité de la psychothérapie. Des études sont encore nécessaires pour examiner cette hypothèse.


 

En 2009, Minerva (1) a commenté une méta-analyse (2) qui évaluait l’efficacité de la psychothérapie pour le traitement de la dépression en première ligne de soins. Nous avions conclu que des indices montraient une efficacité limitée de cette approche, mais que cette évaluation demandait certainement à être poursuivie.

 

Une récente méta-analyse a repris ce sujet tout en élargissant la question clinique. Elle a en effet évalué l’efficacité de différentes formes de psychothérapie versus prise en charge standard ou placebo (3). Les chercheurs ont trouvé 30 études avec des données concernant 5 159 patients qui avaient suivi différentes formes de thérapie en face à face (thérapie cognitivo-comportementale (TCC), thérapie de résolution de problèmes, thérapie interpersonnelle et autres formes de thérapies) ou de thérapie à distance (TCC avec thérapeute, thérapie de résolution de problèmes avec thérapeute, TCC sur la base d’une auto-assistance accompagnée et TCC sur la base d’une auto-assistance avec soutien minimal).

 

La différence moyenne standardisée (DMS) pour l’ensemble des études était de - 0,29 (avec IC à 95% de - 0,37 à - 0,22 ; I² = 34%). Les DMS variaient de - 0,24 (avec IC à 95% de - 0,47 à - 0,02) pour la thérapie interpersonnelle en face à face à - 0,43 (avec IC à 95% de - 0,62 à - 0,24) pour la TCC avec thérapeute à distance. Les différences entre les diverses formes de psychothérapie n’étaient toutefois pas statistiquement significatives (p = 0,74). Les analyses de sous-groupes tendent à montrer que la psychothérapie n’est pas efficace chez les patients atteints de dépression mineure ou de dysthymie versus patients souffrant de dépression majeure (DMS poolée de - 0,38 avec IC à 95% de - 0,50 à - 0,25) ou d’une variété de troubles dépressifs (DMS poolée de - 0,31 avec IC à 95% de - 0,41 à - 0,21). Par ailleurs, aucune différence d’efficacité n’a été observée selon le risque de biais de l’étude, l’ampleur de l’étude, l’âge des patients, la stratégie de recrutement, la manière dont la thérapie a été pratiquée et le nombre de séances suivies.

 

Ces résultats concordent avec ceux de la méta-analyse précédente (2). La principale différence tient dans le fait que cette étude n’a montré aucune différence en fonction de la stratégie de recrutement. La thérapie était donc aussi efficace, que le patient ait été inclus après sélection générale ou qu’il ait été adressé par le médecin généraliste. Pour le reste, aucune différence d’efficacité n’a été observée entre les diverses formes de thérapie. Les auteurs ne considèrent toutefois pas ceci comme une preuve que toutes les formes de thérapie sont également efficaces. Par contre, ils suggèrent que la motivation, la préférence du patient, et une certaine liberté de choix du mode de psychothérapie par le patient lui-même, seraient des éléments importants pour favoriser l’efficacité de la prise en charge. A tel point que les auteurs suggèrent de privilégier une offre de soins psychothérapeutiques éclectiques plutôt que de favoriser dogmatiquement un seul mode de prise en charge. Etant donné le nombre limité d’études et le degré élevé d’hétérogénéité entre les études, il convient de faire preuve de prudence dans l’interprétation de ces conclusions.

 

Sur base de cette méta-analyse, il semble donc qu’il ne soit pas nécessaire d’adapter la recommandation actuelle de bonne pratique médicale. Pour les formes moins graves de dépression, une approche d’observation attentive (watchfull waiting) et/ou non médicamenteuse (conseil, écoute, accompagnement) reste recommandée (s), qu’elle soit ou non appliquée par le médecin généraliste lui-même (4).

 

Conclusion

Cette méta-analyse confirme l’efficacité de la psychothérapie pour le traitement de la dépression sévère en première ligne de soins. Elle ajoute prudemment que la préférence du patient pour un mode d’approche psychothérapeutique déterminé jouerait peut-être un rôle dans le degré d’efficacité de la psychothérapie. Des études sont encore nécessaires pour examiner cette hypothèse.

 

 

Références 

  1. Pieters G. Psychothérapie en première ligne de soins pour la dépression ? MinervaF 2010 9(1);2-3.
  2. Cuijpers P, van Straten A, van Schaik A, Andersson G. Psychological treatment of depression in primary care: a meta-analysis. Br J Gen Pract 2009;59:e51-e60.
  3. Linde K, Sigterman K, Kriston L, et al. Effectiveness of psychological treatments for depressive disorders in primary care: systematic review and meta-analysis. Ann Fam Med 2015;13:56-68.
  4. Heyrman J, Declercq T, Rogiers R, et al. Aanbeveling voor goede medische praktijkvoering. Depressie bij volwassenen: aanpak door de huisarts. Huisarts Nu 2008;37:284-317.

 


Auteurs

Van Daele T.
Toegepaste Psychologie, Thomas More
COI :

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