Analyse


Bronchiectasie : azithromycine en traitement prolongé ?


15 04 2014

Professions de santé

Analyse de
Altenburg J, de Graaff CS, Stienstra Y, et al. Effect of azithromycin maintenance treatment on infectious exacerbations among patients with non-cystic fibrosis bronchiectasis: the BAT randomized controlled trial. JAMA 2013;309:1251-9.


Conclusion
Cette RCT incluant un échantillon de taille limitée montre l’intérêt d’une administration quotidienne d’azithromycine versus placebo en cas de bronchiectasie non liée à la mucoviscidose chez des adultes présentant des infections respiratoires répétées. Ce traitement est efficace en termes de réduction du nombre d’infections, mais de pertinence clinique non établie sur la fonction respiratoire et au prix d’un accroissement très important du taux de résistance microbienne.


 


Texte sous la responsabilité de la rédaction francophone

 

 

Nous avons déjà évoqué dans la revue Minerva l’absence d’une balance bénéfices/risques favorable de l’administration d’azithromycine en cas de bronchite aigüe (1) et les nombreuses questions concernant l’intérêt d’un traitement prolongé préventif des exacerbations en cas de BPCO (2).

Une étude récemment publiée par Altenburg et coll. (3) évalue l’intérêt d’une administration prolongée d’azithromycine (250 mg/j durant 12 mois) versus placebo chez des adultes présentant des bronchiectasies avec infections répétées, sans être atteints de mucoviscidose. La prévalence de cette affection n’est pas précisée dans la littérature mais « chaque médecin généraliste au Royaume-Uni soigne probablement quelques patients en présentant » comme l’écrivent des auteurs hollandais (4). Chez des enfants atteints de mucoviscidose avec infection respiratoire chronique (avec ou sans Pseudomonas aeruginosa), un traitement préventif par azithromycine (250 à 500 mg/j selon le poids) durant un an diminue le nombre d’exacerbations sans preuve d’une évolution différente de la fonction respiratoire versus placebo sur cette même période (5).

La RCT d’Altenburg est la première publication d’une évaluation sur 12 mois de traitement en cas de bronchiectasie non liée à la mucoviscidose et concerne 89 patients hollandais. En analyse en intention de traiter modifiée (tous les patients randomisés ayant reçu au moins une dose des médicaments de l’étude), un nombre moindre d’exacerbations est observé sous azithromycine (médiane de 0 avec IQR de 0 à 1) versus placebo (médiane de 2 avec IQR de 1 à 3), p < 0,001 pour la différence. Le nombre de sujets avec au moins une exacerbation est de 46 % sous azithromycine et de 80 % sous placebo soit un HR de 0,29 (IC à 95 % de 0,16 à 0,51).Le VEMs évolue favorablement par trimestre (intervalle des visites de contrôle) sous azithromycine tandis qu’il se détériore sous placebo, mais il s’agit de % de valeurs sans certitude d’une pertinence clinique de la différence. Il y a significativement plus de plaintes digestives sous azithromycine : RR de 7,44 (IC à 95 % de 0,97 à 56,88) pour les douleurs abdominales et RR de 8,36 (IC à 95 % de 1,10 à 63,15) pour la diarrhée.

La résistance initiale aux macrolides (pour l’ensemble des bactéries) est de 35 % dans le groupe azithromycine (43 patients) et de 27,5 % dans le groupe placebo (40 patients), différence non significative. En fin d’étude, les pourcentages sont respectivement de 88 % et de 26 %, p < 0,001.

Les macrolides anciens ou nouveaux (néomacrolides) sont des antibiotiques présentant un risque d’interactions médicamenteuses plus fréquent qu’avec d’autres classes d’antibactériens, étant des substrats et des inhibiteurs du CYP3A4. Ce risque est plus fréquent avec l’érythromycine et la clarithromycine qu’avec l’azithromycine. Pour ce motif et pour sa facilité d’emploi (1 administration par jour, éventuellement 2 le premier jour, durée de traitement courte), l’azithromycine est souvent un premier choix dans cette classe-ci d’antibiotiques (sauf pour l’éradication de l’Helicobacter pylori). Un risque accru de décès cardiovasculaire (probablement via un allongement de l’espace QT) avec l’azithromycine a été récemment rapporté (6), non confirmé dans une autre étude avec une population à moindre risque (7). Dans les 2 études, il y avait relativement peu de personnes âgées, généralement plus à risque au point de vue cardiovasculaire.

 

Conclusion

Cette RCT incluant un échantillon de taille limitée montre l’intérêt d’une administration quotidienne d’azithromycine versus placebo en cas de bronchiectasie non liée à la mucoviscidose chez des adultes présentant des infections respiratoires répétées. Ce traitement est efficace en termes de réduction du nombre d’infections, mais de pertinence clinique non établie sur la fonction respiratoire et au prix d’un accroissement très important du taux de résistance microbienne.

 

Références

  1. Coenen S. L'azithromycine en cas de bronchite aiguë. MinervaF 2003;2(4):63-4.
  2. Chevalier P. Exacerbations de BPCO : azithromycine en prévention ? MinervaF 2011;10(10):119-20.
  3. Altenburg J, de Graaff CS, Stienstra Y, et al. Effect of azithromycin maintenance treatment on infectious exacerbations among patients with non-cystic fibrosis bronchiectasis: the BAT randomized controlled trial. JAMA 2013;309:1251-9.
  4. ten Hacken NH, Wijkstra PJ, Kerstjens HA. Treatment of bronchiectasis in adults. BMJ 2007;335:1089-93.
  5. Clement A, Tamalet A, Leroux E, et al. Long-term effects of azithromycin in patients with cystic fibrosis: a double blind, placebo controlled trial. Thorax 2006;61:895-902.
  6. Ray WA, Murray KT, Hall K, et al. Azithromycin and the risk of cardiovascular death. N Engl J Med 2012;366:1881-90.
  7. Svanström H, Pasternak B, Hviid A. Use of azithromycin and death from cardiovascular causes. N Engl J Med 2013;368:1704-12.

 

 

Bronchiectasie : azithromycine en traitement prolongé ?



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