Analyse
Influence du type de fruits consommés sur le risque de diabète de type 2
15 06 2014
Professions de santé
Texte sous la responsabilité de la rédaction francophone
Le diabète de type 2 est habituellement considéré comme une maladie fortement liée au mode de vie et à l’alimentation en général. Nous avons déjà insisté dans la revue Minerva (1) sur l’importance de l’éducation du patient diabétique, notamment en matière d’alimentation. Celle-ci peut-elle avoir également un effet préventif, notamment la consommation de fruits ? Il existe plusieurs études de cohorte ayant investigué le lien entre la consommation régulière de fruits et la survenue d’un diabète de type 2. Ces études ont montré des résultats variables (2). Toutefois, la variabilité entre les populations étudiées et le type de fruit consommé peut avoir eu une influence sur les résultats : les différents fruits ont une composition extrêmement variable en termes de charge glycémique, de contenu en antioxydant et en fibres ou autres composés pouvant avoir une influence sur la santé. Il peut également exister des facteurs confondants comme l’hygiène nutritionnelle en général, l’âge et l’activité physique.
Il restait donc à explorer de manière plus précise le rôle individuel de chaque fruit et à exclure certains facteurs confondants.
En 2013 est parue une méta-analyse (3) basée sur les données de trois cohortes existantes d’individus sains, tous professionnels de la santé. Les deux premières sont composées uniquement de femmes (4,5) et la troisième uniquement d’hommes (6). Les données relatives à la consommation de fruits ont été collectées via des questionnaires écrits envoyés par la poste tous les quatre ans. Via une analyse multivariée, une stratification par catégories, le rôle de différents facteurs confondants a été étudié, notamment la consommation concomitante des autres fruits, les autres habitudes alimentaires, l’exercice physique. Le coefficient de corrélation entre les réponses au questionnaire et la consommation effective de fruits n’était pas excellent : coefficient de 0,2 à 0,8. Un biais de déclaration n’est donc pas exclu.
Les critères diagnostiques du diabète ont été modifiés en cours d’étude (critère pour la glycémie à jeûn passant de 140 mg/dL à 126 mg/dL).
La consommation globale de fruits était associée à une réduction faible, mais significative du risque de diabète, avec un Risque Relatif de 0,98 (avec IC à 95 % de 0,96 à 0,99) pour chaque augmentation de 3 rations par semaine. Après correction pour les autres facteurs liés au mode de vie, le score de qualité sanitaire de l’alimentation et la consommation de jus de fruits, l’association persistait, sauf pour le melon. Après ajustement pour la consommation des autres fruits, l’association disparaissait pour la consommation de fraises et devenait positive pour le melon. Les risques relatifs correspondant à trois rations par semaine étaient très variables, allant d’un RR de 0,74 (avec IC à 95 % de 0,68 à 0,83) pour les myrtilles à un RR de 1,1 (avec un IC à 95 % de 1,02 à 1,18) pour le melon. La substitution des fruits par du jus de fruit était associée à un RR de 1,08 (avec IC à 95 % de 1,05 à 1,11) pour trois rations par semaine. La charge glycémique et l’index glycémique du fruit consommé n’avaient pas d’influence majeure. Les auteurs n’ont pas effectué de correction de Bonferroni pour les hypothèses multiples.
Cette méta-analyse ne permet pas d’inférer une causalité, mais elle montre une faible association entre une augmentation de la consommation de fruits et la réduction du risque de diabète. Malgré certaines limites, elle est remarquable en ce sens qu’elle a exploré et exclu un grand nombre de facteurs confondants. Elle permet en outre de mettre à l’épreuve de nombreuses idées reçues concernant les fruits « très sucrés » et les fruits « peu sucrés », et le rôle de la substitution des fruits par le jus de fruit.
Elle illustre par ailleurs la difficulté qu’il existe à montrer le rôle spécifique de l’un ou l’autre composant de l’alimentation dans la survenue du diabète de type 2.
Conclusion
Cette méta-analyse d’études d’observation montre une faible association entre une augmentation de la consommation de fruits et la réduction du risque de diabète, avec un risque relatif variable selon le type de fruits. La consommation de jus de fruits plutôt que de fruits ne montre pas d’effet préventif voire une augmentation de risque.
Références
- Goderis G. Programme éducatif structuré pour le diabète de type 2 récemment diagnostiqué ? MinervaF 2008;7(10):152-3.
- Carter P, Gray LJ, Troughton J, et al. Fruit and vegetable intake and incidence of type 2 diabetes mellitus: systematic review and meta-analysis. BMJ 2010;341:c4229.
- Muraki I, Imamura F, Manson JE. Fruit consumption and risk of type 2 diabetes: results from three prospective longitudinal cohort studies. BMJ 2013;347:f5001.
- Schulze MB, Manson JE, Willett WC, Hu FB. Processed meat intake and incidence of type 2 diabetes in younger and middle-aged women. Diabetologia 2003;46:1465-73.
- Fung TT, Schulze M, Manson JE, et al. Dietary patterns, meat intake, and the risk of type 2 diabetes in women. Arch Intern Med 2004;164:2235-40.
- Van Dam RM, Willett WC, Rimm EB, et al. Dietary fat and meat intake in relation to risk of type 2 diabetes in men. Diabetes Care 2002;25:417-24.
Auteurs
Richard T.
endocrinologue, Service de Médecine Interne CHU de Charleroi-Chimay
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