Analyse
Antibiotiques pour l’OMA : moins ou plus de 7 jours ?
28 03 2011
Professions de santé
Pour traiter l’otite moyenne aiguë (OMA), le guide belge des traitements anti-infectieux de la BAPCOC (1) recommande, quand un antibiotique est nécessaire, un traitement durant 5 à 7 jours. Cette recommandation repose sur des preuves de l’efficacité d’un traitement court (e.a. PICHICHERO en 1997 (2)), d’une méta-analyse de 32 RCTs parue dans le JAMA (3) en 1998 concluant à un intérêt similaire entre les études de traitement antibiotique de l'OMA pendant des périodes de 5 jours, par rapport à celles de cures de 8 à 10 jours. Elle repose aussi sur l’observation d’un risque accru de portage de S. pneumoniae résistant après un traitement par bêtalactame si celui-ci dépasse les 5 jours (4).
La plupart des auteurs de la méta-analyse de 1998 ont effectué une nouvelle synthèse (5) de la littérature comparant des traitements de > 48h mais moins de 7 jours à des traitements d’au moins 7 jours en cas d’OMA, chez des enfants (maximum 18 ans). La méta-analyse des 49 RCTs avec comparaison directe (n=12 045) amène cette fois-ci une conclusion différente : un risque d’échec thérapeutique (absence de guérison clinique, rechute ou récidive d’OMA dans le mois post initiation de l’antibiothérapie) est plus important sous antibiothérapie courte (21%) que sous traitement long (18%), soit une différence absolue de 3%, un OR de 1,34 avec IC à 95% de 1,15 à 1,55. Le bénéfice est significatif pour les évaluations entre 8 et 19 jours, mais non à 20 à 30 jours, à 30 à 45 jours, à 3 mois ou plus. Par contre les effets indésirables gastro-intestinaux sont nettement moindres avec les traitements courts (OR 0,72 avec IC à 95% de 0,60 à 0,87). Les auteurs concluent à un bénéfice minime à court terme de traitements antibiotiques d’au moins 7 jours mais à mettre en balance avec les inconvénients des antibiothérapies.
Plusieurs considérations sont à exprimer. L’analyse des différentes études montre qu’une différence significative entre les 2 groupes est rarement observée (3/16 dans la MA principale). La différence est donc liée à l’effet de sommation. L’hétérogénéité statistique n’est pas importante (test I² à 28%). L’hétérogénéité clinique pose par contre un fort problème d’interprétation de ces résultats pour la pratique. Les antibiotiques les plus évalués sont l’azithromycine pour les traitements courts (souvent 3 jours) et l’amoxi-clavulanate 10 jours pour les traitements longs. Une seule étude (de Saintonge en 1982 (6)) compare un traitement court d’amoxicilline (3 jours) à un traitement long (10 jours) d’amoxicilline… sans montrer de différence significative. De nombreuses études sont réalisées avec du ceftriaxone (en IM), du céfaclor (intrinsèquement moins actif sur le pneumocoque que l’amoxicilline), ou une autre céphalosporine durant 5 jours. Nous ne pouvons donc rien conclure d’utile de cette méta-analyse pour la pratique quant à la durée d’un traitement antibiotique.
Conclusion
Cette méta-analyse n’apporte pas de preuve que la recommandation de donner une amoxicilline durant 5 à 7 jours, quand elle est indiquée en cas d’OMA, doive être remise en cause.
Références
- Guide belge des traitements anti-infectieux en pratique ambulatoire. BAPCOC. Edition 2008.
- Pichichero ME, Cohen R. Shortened course of antibiotic therapy for acute otitis media, sinusitis and tonsillopharyngitis. Pediatr Infect Dis J 1997;16:680-95.
- Kozyrskyj AL, Hildes-Ripstein E, Longstaffe SE, et al. Treatment of acute otitis media with a shortened course of antibiotics: a meta-analysis. JAMA 1998;279:1736-42.
- Guillemot D, Carbon C, Balkau B, et al. Low dosage and long treatment duration of beta-lactam: risk factors for carriage of penicillin-resistant Streptococcus pneumoniae. JAMA 1998;279:365-70.
- Kozyrskyj AL, Klassen TP, Moffatt M, Harvey K. Short-course antibiotics for acute otitis media. Cochrane Database of Systematic Reviews 2010, Issue 9.
- Chaput de Saintonge DM, Levine DF, Savage IT, et al.Trial of three-day and ten-day courses of amoxycillin in otitis media. Br Med J (Clin Res Ed) 1982;284:1078-81.
Ajoutez un commentaire
Commentaires