Revue d'Evidence-Based Medicine



Traitement de la dépression chez la personne âgée



Minerva 2002 Volume 1 Numéro 10 Page 36 - 37

Professions de santé


Analyse de
Freudenstein U, Jagger C, Arthur A, Donner-Banzhoff N. Treatments for late life depression in primary care – a systematic review. Fam Pract 2001;18:321-7.


Conclusion
Cette synthèse méthodique conclut que le nombre de bonnes études est insuffisant pour pouvoir définir l’accompagnement de personnes âgées dépressives.Une synthèse Cochrane montre que les ATC et ISRS sont efficaces. Il n’y a pas suffisamment d’études pertinentes permettant de déterminer la place des psychothérapies. En conclusion, sur base de la littérature scientifique pertinente actuellement disponible, des recommandations évidentes pour la prise en charge de la dépression chez des personnes âgées ne peuvent être formulées.


Minerva « en bref » vous propose de brefs commentaires sur des publications sélectionnées par le comité de rédaction de Minerva. Des études intéressantes et pertinentes pour les médecins généralistes qui ne doivent pas ou ne peuvent pas être discutées dans un cadre plus large trouvent leur place dans cette rubrique. Chaque sélection est brièvement résumée et accompagnée de quelques commentaires faits par un référent. La rédaction de Minerva vous en souhaite une agréable lecture.

Résumé

Les auteurs constatent que la dépression est une affection courante chez les personnes âgées et pour laquelle elles font régulièrement appel aux services de santé. La mortalité liée à la dépression est relativement élevée. Nonobstant, il n’y a pas de synthèse méthodique examinant l’effet en 1re ligne des différentes thérapies pour les personnes âgées.

Cette synthèse méthodique est bâtie sur une question (de recherche) entraînant une recherche systématique des études originales qui pourraient apporter une réponse à cette question. Elle mentionne également les bases de données consultées et les méthodes d’analyse utilisées. Les résultats figurant dans les études et les caractéristiques individuelles de ces différentes études sont analysés et évalués de manière explicite. Chaque méta-analyse est précédée, en principe, d’une synthèse méthodique.">synthèse méthodique a recherché non seulement des articles en anglais, mais également des articles en français et en allemand, publiés entre 1980 et 1999. Cinq études ont été sélectionnées, sur base de critères inclusifs établis par la Cochrane Effective Practice and Organisation of Care Review Group1. Seules deux études concernaient uniquement des personnes âgées ; les trois autres incluaient outre les personnes âgées, des patients plus jeunes. Les auteurs n’ont pas trouvé d’études évaluant l’effet de la psychothérapie chez les personnes âgées. Les études relatives aux anti-dépresseurs étaient de moins bonne qualité, réalisaient un suivi de seulement 4 à 8 semaines et excluaient presque tous les patients présentant une comorbidité (physique,mentale, utilisation d’autres médicaments psychotropes). C’est pourquoi les auteurs terminent en reconnaissant qu’aucune conclusion solide ne peut en être tirée concernant la prise en charge de la dépression de la personne âgée en 1re ligne. Non seulement, on ne peut pas tirer de conclusion sur l’effet d’une psychothérapie, mais non plus sur l’effet des antidépresseurs : nous ne savons pas si les antidépresseurs tricycliques ou ISRS (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine) sont à préférer.

Analyse

Deux études seulement, de méthodologie problématique

Nous avons pas mal de réserves quant à la méthodologie de cette synthèse méthodique.Nulle part, il n’est fait une distinction entre dépression mineure et majeure, élément pourtant de base aussi bien pour les cliniciens que pour les chercheurs 1, 2. Dans les deux recherches ne concernant que des personnes âgées, les antidépresseurs prescrits ne sont pas mentionnés. Elles ont été menées, toutes deux en Grande-Bretagne où les effets du «Nurse outreach» et du «Care Package, psychogeriatric team» ont été évalués: nous ne savons pas quel en est le contenu et si nous pouvons extrapoler ce concept en Belgique où d’autres structures de soins existent. Dans la première étude, il y a eu deux fois plus d’antidépresseurs prescrits dans les groupes d’intervention et dans la 2e étude, même 4 fois plus.  

Intérêt pour la pratique ?

Avec un étonnement croissant, nous constatons que sur base de cette synthèse méthodique, nous n’avons pas d’éléments permettant de définir en 1re ligne notre prise en charge thérapeutique pour les personnes âgées dépressives. Jusqu’à ce jour, nous avons extrapolé cette prise en charge à partir d’études concernant des patients adultes de tous âges, mais est-ce pertinent 2. Peu à peu, des études sont initiées sur le pronostic de la dépression de la personne âgée, la survenue de récidives chez les personnes âgées et également sur le choix du bon anti-dépresseur 3-6. Cette synthèse méthodique nous montre (dans tous les cas) que nous ne pouvons que nous référer aux textes de consensus et à l’expérience clinique 2, 5, 7 pour le choix de thérapie chez la personne âgée. Une des conclusions des auteurs est un besoin urgent d’études complémentaires et tout particulièrement d’études relatives à l’effet de thérapies non pharmacologiques. Récemment, une synthèse Cochrane a été publiée 8 sur ce sujet. Elle inclut 17 études et concerne, une fois encore, principalement les ATC (antidépresseurs tricycliques), les ISRS (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine) et les IMAO (inhibiteurs de la mono-amine-oxydase). Ces trois groupes d’anti-dépresseurs sont, d’après les « reviewers », efficaces et doivent être dispensés pendant au moins 6 semaines. Il y a peu de preuves de l’efficacité des ATC à plus faibles doses.

 

Conclusion

Cette synthèse méthodique conclut que le nombre de bonnes études est insuffisant pour pouvoir définir l’accompagnement de personnes âgées dépressives.Une synthèse Cochrane montre que les ATC et ISRS sont efficaces. Il n’y a pas suffisamment d’études pertinentes permettant de déterminer la place des psychothérapies. En conclusion, sur base de la littérature scientifique pertinente actuellement disponible, des recommandations évidentes pour la prise en charge de la dépression chez des personnes âgées ne peuvent être formulées.

 

Conflits d’intérêt/financement

Cette étude a été financée par le « Regional Office of the NHS Executive Trent » (G.B.). Pas de conflits d’intérêt mentionnés.  

 

Références

  1. Cochrane Effective Practice and Organisation of Care Review Group. The Data Collection Checklist. http://www.abdn.ac.uk/publichealth/hsru/epoc/checklist.98.doc [3/6/'99]
  2. Geddes J, Butler R. Depressive disorders. Clinical Evidence 2002;7:867-82.
  3. Cole MG, Bellavance F, Mansour A. Prognosis of depression in elderly community and primary care populations: a systematic review and meta-analysis. Am J Psychiatry 1999;156:1282-9.
  4. Reynolds CF, Frank E, Perel JM, et al. Nortriptyline and interpersonal psychotherapy as maintenance therapies for recurrent major depression – a randomized controlled trial in patients older than 59 years. JAMA 1999;281:39-45.
  5. De Meyere M. Onderhoudsbehandeling van depressie bij ouderen. Huisarts Nu (Minerva) 2000;30:153-7.
  6. Livingston M, Livingston H. New antidepressants for old people? The evidence that newer drugs are much better than the old is thin. BMJ 1999;318:1640-1.
  7. Het doelmatig gebruik van antidepressiva. Teksten van de deskundigen. Deel 1 en 2. Consensusvergadering 14 maart 2000. Brussel: RIZIV, 2000.
  8. Wilson K, Mottram P, Sivanranthan A, Nightingale A. Antidepressants versus placebo for the depressed elderly (Cochrane Review). In: The Cochrane Library, Issue 4, 2002. Oxford: Update Software.
Traitement de la dépression chez la personne âgée

Auteurs

De Meyere M.
Vakgroep Huisartsgeneeskunde en Eerstelijnsgezondheidszorg, UGent
COI :

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