Analyse


Influenza : résistance aux inhibiteurs de la neuraminidase


28 02 2012

Professions de santé

Analyse de
Thorlund K, Awad T, Boivin G, Thabane L. Systematic review of influenza resistance to the neuraminidase inhibitors. BMC Infect Dis 2011;11:134.


Conclusion
Cette synthèse méthodique montre que la résistance aux inhibiteurs de la neuraminidase est en moyenne moins élevée qu’attendue, mais nous maintenons notre avis pour une utilisation réservée de ces médicaments en raison du bénéfice faible et d’une variation de résistance d’une région à l’autre et d’une souche virale à une autre.



 

 

La revue Minerva a déjà consacré plusieurs analyses (1-4) à l’utilisation des inhibiteurs de la neuraminidase pour la prévention et le traitement de l’influenza.

Chez des adultes et des enfants par ailleurs sains les inhibiteurs de la neuraminidase ont un effet limité sur la sévérité et la durée des symptômes s’ils sont initiés dans les 48 heures après l’apparition des premiers symptômes. Les preuves de leur intérêt en prévention des complications font cependant défaut. Pour l’oseltamivir, des effets indésirables sont décrits tels que nausées et vomissements et d’autres plus rares mais sévères (surtout chez les enfants) tels qu’un risque accru de comportement suicidaire, des hallucinations, des convulsions, des délires et des troubles extrapyramidaux. Il n’est donc pas conseillé d’utiliser les inhibiteurs de la neuraminidase à grande échelle durant une grippe saisonnière, ni à titre prophylactique, ni à titre thérapeutique. Un problème supplémentaire est l’apparition de résistance.

 

Une synthèse méthodique récente (5) donne un aperçu de toutes les données concernant une résistance aux inhibiteurs de la neuraminidase enregistrés : oseltamivir, zanamivir, peramivir et laninamivir (les deux derniers étant commercialisés au Japon uniquement). Une résistance n’est décrite que pour l’oseltamivir, avec une incidence sommée de 2,6% (IC à 95% de 0,7 à 5,5%), incidence moins importante qu’attendue mais il faut tenir compte de l’hétérogénéité des données disponibles. Par exemple, chez des patients avec grippe saisonnière à A/H1N1, une incidence de résistance plus élevée (jusqu’à 27,3%) a été observée. Dans certains pays européens, durant la saison épidémique A/H1N1 de 2007-2008, la résistance à l’oseltamivir est même grimpée à 68% (6). La synthèse méthodique (5) montre également que les patients avec résistance à l’oseltamivir ont 4 fois plus de risque de présenter une pneumonie que les patients non résistants à l’oseltamivir, sans que nous sachions si cette complication est liée à la résistance ou à une production virale prolongée comme lors d’une réponse immunitaire déficitaire. Les auteurs insistent aussi sur la rareté de bonnes preuves. Depuis l’année 2000 aucune nouvelle RCT n’a été effectuée avec le zanamivir et le peramivir, avec donc une insuffisance de données récentes disponibles. Il existe une résistance croisée théorique entre oseltamivir et peramivir. Cette synthèse méthodique ne montre pas de différence entre différents sous-groupes. Une autre synthèse (7) montre quand même un lien entre une résistance et une production virale prolongée, par exemple chez les enfants et les patients avec immunosuppression. En outre, des souches de virus influenza mutés ont été isolées chez des personnes précédemment traitées avec des inhibiteurs de la neuraminidase (6,7). A ce jour, peu de résistances ont été observées pour la grippe pandémique à A/H1N1, mais ceci pourrait changer rapidement en cas d’utilisation non réfléchie des inhibiteurs de la neuraminidase (6).

 

Conclusion

Cette synthèse méthodique montre que la résistance aux inhibiteurs de la neuraminidase est en moyenne moins élevée qu’attendue, mais nous maintenons notre avis pour une utilisation réservée de ces médicaments en raison du bénéfice faible et d’une variation de résistance d’une région à l’autre et d’une souche virale à une autre.

 

Références

  1. Michiels B. Les inhibiteurs de la neuraminidase chez l’adulte. Minerva online 22/10/2010.
  2. Michiels B. Inhibiteurs des neuraminidases chez l’enfant pour l’influenza (prévention et traitement). MinervaF 2010;9(4):42-3.
  3. Michiels B. Médicaments contre l’influenza chez les adultes en bonne santé. MinervaF 2007;6(2):18-20.
  4. Govaerts F. De Meyere M. Inhibiteurs de la neuraminidase dans la prévention et le traitement de l'influenza. MinervaF 2005;4(2):23-6.
  5. Thorlund K, Awad T, Boivin G, Thabane L. Systematic review of influenza resistance to the neuraminidase inhibitors. BMC Infect Dis 2011;11:134.
  6. Meijer A, Lackenby A, Hungnes O, et al; European Influenza Surveillance Scheme. Oseltamivir-resistant influenza virus A (H1N1), Europe, 2007-08 season. Emerg Infect Dis 2009;15:552-60.
  7. van der Vries E, Schutten M, Boucher CA. The potential for multidrug-resistant influenza. Curr Opin Infect Dis 2011;24:599-604.
Influenza : résistance aux inhibiteurs de la neuraminidase

Auteurs

Michiels B.
Vakgroep Eerstelijns- en Interdisciplinaire Zorg, Centrum voor Huisartsgeneeskunde, Universiteit Antwerpen
COI :

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