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Minerva étant une revue d'Evidence-Based Medicine promeut la diffusion d'une information scientifique indépendante et apporte une analyse critique des publications pertinentes dans la littérature internationale.


Sommaire octobre 2024


La perte auditive et le port d’aides auditives sont-elles associées à la démence chez les personnes âgées ?

Page 177 - page 180 

Vanhoof E.  

Cette étude de cohorte prospective à grande échelle, correctement menée d’un point de vue méthodologique, suggère que la perte auditive, par rapport à une audition normale, est associée à un risque accru de diagnostic de démence, en tenant compte des covariables pertinentes. Chez les personnes malentendantes qui portent des aides auditives, le risque semble être plus faible, mais d’autres études randomisées contrôlées avec une classification précise de la perte auditive et de la démence sont nécessaires pour évaluer l’efficacité des aides auditives dans ce contexte.


Continuer les antivitamines K ou passer aux anticoagulants oraux directs chez les personnes âgées fragiles présentant une fibrillation auriculaire ?

Page 181 - page 184 

Van der Linden L.  

Cette étude randomisée contrôlée pragmatique montre que, dans une population âgée et fragile souffrant de fibrillation auriculaire et dont le traitement anticoagulant avec des antivitamines K a été bien géré pendant des années, la poursuite des antivitamines K est plus sûre que le passage à des anticoagulants oraux directs, en termes d’hémorragies majeures et d’hémorragies non majeures cliniquement significatives.


Psychothérapie en cas de dépression chez une personne âgée qui réside dans un établissement de soins de longue durée

Page 185 - page 190 

Stas P.  

Cette synthèse méthodique Cochrane avec méta-analyse montre que la psychothérapie à court terme et à long terme réduit les symptômes dépressifs chez les personnes âgées qui résident dans des établissements de soins de longue durée. Cependant, l’étude présente de nombreuses limites, notamment une hétérogénéité clinique importante entre les interventions incluses, entre les groupes témoins et entre les contextes étudiés. En outre, le degré de certitude des données probantes est très faible. Ainsi, la conclusion que nous pouvons tirer de la présente synthèse méthodique se limite à constater la nécessité de mener davantage d’études correctement conduites, ainsi que des études comparant l’efficacité de la psychothérapie à celle de la pharmacothérapie.


Effet du régime alimentaire traditionnel atlantique sur la santé et sur l’environnement

Page 191 - page 194 

De Cort P.  

L’analyse secondaire de cette étude randomisée pragmatique en grappes montre qu’un mode d’alimentation traditionnel ancré localement (régime alimentaire atlantique), axé sur les aliments végétaux de saison et le poisson, ainsi que sur d’autres facteurs liés au mode de vie (comme le fait de manger tranquillement ensemble, de faire suffisamment d’exercice), entraîne une diminution de l’incidence du syndrome métabolique par rapport à un mode d’alimentation habituel. Cependant, aucun gain statistiquement significatif concernant certaines composantes du syndrome métabolique ou l’empreinte écologique n’a pu être montré, peut-être en raison d’un manque de puissance. En outre, on ne sait pas actuellement dans quelle mesure les résultats peuvent être extrapolés à une autre population et à une autre région.


Influence du régime alimentaire et du moment de la prise des suppléments de fer sur l’absorption du fer

Page 195 - page 198 

Laekeman G.  

Cette étude croisée randomisée contrôlée menée en ouvert chez des femmes présentant une carence en fer mais pas d’anémie montre que l’absorption du fer provenant d’un supplément de fer (100 mg de fer élémentaire sous forme de fumarate) est optimale lorsqu’il est pris à jeun le matin, sans café ni petit-déjeuner standard. La prise concomitante de 80 ou 500 mg de vitamine C à jeun peut augmenter l’absorption du fer.


Les interactions psychosociales pour diminuer les antipsychotiques chez les résidents de maison de repos


26 09 2024 

Dequiedt C.  

Cette revue systématique présente une méthodologie solide. Néanmoins, les résultats inconstants ainsi que l’importante hétérogénéité entre études n’a pas permis de méta-analyse. Les résultats sont présentés de manière narrative et ils ne permettent pas de tirer de conclusions concernant l’efficacité des interventions psychosociale pour diminuer les antipsychotiques chez les résidents de MRS. Vu les risques parfois importants et graves et l’efficacité limitée des traitements médicamenteux dans la prise en charge des personnes démentes présentant des troubles du comportement, les interventions non-médicamenteuses restent néanmoins le premier choix. De nouvelles recherches sont indispensables.


Quelle est la place des interventions pour l'activité physique et contre la sédentarité ainsi que sur le comportement dans la revalidation post-AVC?


26 09 2024 

Jayaswal A.  

Cette synthèse méthodique avec méta-analyses de bonne qualité méthodologique montre que, chez des patients en post-AVC, l’approche combinée d’exercices physiques et de techniques de changement de comportement augmente la marche et les activités modérées et vigoureuses dans la phase aigüe/subaigüe et que l’exercice physique seul a un impact sur la marche en phase chronique. De plus, seules des preuves de très faible à faible qualité soutiennent le recours à des interventions basées uniquement sur les techniques de changement de comportement après un AVC.


Évaluation de l'efficacité de l'hospitalisation à domicile pour éviter l'admission chez les personnes adultes (âgées) ?


26 09 2024 

Tock R.  

Cette synthèse méthodique montre que l'hospitalisation à domicile pour éviter l'admission, avec la possibilité de transfert à l'hôpital, peut fournir une alternative efficace aux soins hospitaliers pour des patients âgés référés pour une admission à l'hôpital et sélectionnés. L'intervention ne fait probablement pas de différence sur les résultats sur la mortalité et les admissions à l’hôpital ; améliore la satisfaction des patient ; réduit probablement la probabilité de déménager dans une maison de soins et réduit probablement les coûts. Cette revue systématique avec méta-analyse est de bonne qualité méthodologique mais est basée sur des études originales avec des échantillons de relatives petites tailles ce qui peut limiter la puissance statistique. Autre point important, le niveau de qualification des personnes s’occupant des patients hospitalisés à domicile n’est que vaguement mentionné ce qui pourrait impacter fortement la qualité de prise en charge des patients à domicile et leurs coûts. L’application de l’hospitalisation à domicile semble, à l’heure actuelle, difficilement applicable en Belgique en dehors de projets pilotes, comme recommandé par le KCE.


L’IRM, rôle encore à définir pour guider le diagnostic du dépistage opportuniste du cancer prostatique


26 09 2024 

Sculier J.P.  

Pour les auteurs, les résultats de leur revue systématique et méta-analyse suggèrent que l'IRM de la prostate avec biopsies ciblées est une stratégie efficace pour la détection précoce du cancer de la prostate. Ils ont constaté que l'IRM atténue les pièges des stratégies standard basées sur le PSA, car elle peut être associée à moins de biopsies inutiles et permet d'éviter la détection de cancers insignifiants tout en permettant de détecter les maladies cliniquement significatives. Leurs résultats soulignent la nécessité de réévaluer l’approche du dépistage de population ; cependant, la configuration optimale de l'IRM et le schéma de biopsie dans le processus de dépistage nécessitent une évaluation plus approfondie. Pour Minerva, l’intégration de l’IRM dans la stratégie diagnostique lors du dépistage opportuniste du cancer de la prostate pourrait avoir des avantages. Avant de la recommander, il faudrait avoir plus de données, notamment concernant les conditions techniques de l’IRM, le rapport coût-efficacité et les effets secondaires.


Intérêt du sémaglutide dans l'insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée et obésité ?


26 09 2024 

Hammouch F., Abulatifa A., De Jonghe M.  

Cette RCT en double aveugle versus placebo, menée auprès de patients avec insuffisance cardiaque avec fraction d'éjection préservée (HFpEF) et obèses, montre que le sémaglutide à la posologie de 2,4 mg, administré une fois par semaine en sous-cutané, réduit significativement les symptômes cardiaques, les limitations physiques et la perte de poids à 52 semaines. Ces résultats suggèrent que le sémaglutide pourrait être une option thérapeutique importante pour cette population. Cependant, il est associé à plus d'interruptions de traitement liées principalement à des effets gastro-intestinaux. Les auteurs soulignent, par ailleurs, certaines limites de l'étude, notamment la durée de suivi limitée à un an, le faible nombre de participants non blancs et le manque d’évaluation des hospitalisations pour insuffisance cardiaque.



La perte auditive et le port d’aides auditives sont-elles associées à la démence chez les personnes âgées ?

Contexte

En Europe, environ 30% des hommes et 20% des femmes de plus de 70 ans souffrent d’une perte auditive d’au moins 30 dB entraînant des répercussions dans la vie quotidienne (1). Avec une perte auditive de 30 dB, il est difficile d’entendre les sons de faible intensité (bruissement de feuilles, chuchotements) et de suivre les conversations dans un environnement bruyant. Des études de cohortes prospectives ont montré que la perte auditive était associée à une plus forte prévalence de démence (2-4). En outre, une étude transversale menée chez des personnes souffrant de perte auditive a également révélé que le risque de démence était plus élevé chez les personnes qui ne portaient pas d’aides auditives (5). Une RCT multicentrique menée en ouvert, qui a fait l’objet d’une discussion dans Minerva, a montré que, par comparaison avec une éducation à la santé, une aide auditive associée à une technologie d’assistance ne montrait pas d’efficacité supplémentaire après trois ans sur les fonctions cognitives des personnes âgées présentant une perte auditive. L’intervention s’est avérée utile dans un sous-groupe présentant davantage de facteurs de risque de déclin cognitif (6,7). Une récente étude de cohorte prospective à grande échelle a de nouveau examiné la relation entre la perte auditive et la démence ainsi que l’influence du port d’aides auditives sur cette relation (8). 

 

 

Résumé 

 

Population étudiée 

  • recrutement, par le biais du registre résidentiel et national, d’adultes âgés de 50 ans ou plus qui résidaient dans le sud du Danemark entre 2003 et 2017 
  • exclusion des personnes chez qui avait été diagnostiquée une démence, des personnes dont l’adresse était incomplète ou qui n’habitaient plus dans la région depuis plus de 5 ans ainsi que des personnes pour qui les informations sur les co-variables étaient manquantes
  • ont finalement été inclus 573088 adultes ayant en moyenne 60,8 ans (ET : 11,3) ; 52% de femmes ; la plupart vivant seuls (72,9%) ; environ 20% ayant un revenu faible et 22% un revenu élevé ; 44,4% étant à la retraite ; 15,8% ayant un niveau de formation élevé. 

 

Protocole d’étude 

Étude de cohorte prospective 

  • identification des personnes souffrant d’une perte auditive après l’inclusion, sur la base des éléments suivants :
    • la base de données Hearing Examinations in Southern Denmark (HESD), qui a recueilli les données audiométriques individuelles de 145000 personnes dans trois cliniques ambulatoires financées par le gouvernement : (1) moyennes des sons purs (pure tone average, PTA) sur la base des seuils auditifs (en dB) pour 500 Hz, 1000 Hz, 2000 Hz et 4000 Hz pour la meilleure oreille et la moins bonne oreille ; (2) perte auditive ou absence de perte auditive définie comme une valeur seuil > 20 dB pour toutes les fréquences dans la meilleure oreille ; (3) sévérité de la perte auditive basée sur la PTA (exprimée en niveau d’audition (decibels Hearing Level, dB HL) (≤ 25 dB pour une audition normale, entre 26 et 40 dB pour une perte auditive légère, entre 41 et 60 dB pour une perte auditive modérée et > 60 dB pour une perte auditive sévère)
    • deux bases de données régionales ayant recueilli des informations sur toutes les personnes demandant le remboursement d’aides auditives ou de piles pour aides auditives
    • diagnostic de perte auditive enregistré dans le registre national des patients
    • examen audiométrique ou adaptation d’aides auditives dans une polyclinique ORL privée inscrite au registre national des soins de santé
  • identification de la démence au cours du suivi sur la base du diagnostic de démence dans le registre national des patients et de la première prescription d’un médicament contre la démence (rivastigmine, donépézil, mémantine, galantamine) dans le registre national des prescriptions.

 

Mesure des résultats

  • rapport entre la perte auditive et l’apparition de la démence
  • modèle à risques proportionnels de Cox avec correction pour tenir compte de l’âge et du sexe et avec correction pour tenir compte d’autres covariables (cohabitant ou non, niveau de formation, revenu, pays d’origine, statut quant à l’emploi, variables socioéconomiques dépendant de la région, maladie cardio-métabolique (diabète, AVC, cardiopathie ischémique, insuffisance cardiaque))
  • analyse de sous-groupe des personnes malentendantes portant des aides auditives. 

 

Résultats

  • sur les 573088 participants, 41104 (7,2%) présentaient une perte auditive (« valeur seuil > 20 dB pour toutes les fréquences dans la meilleure oreille (base de données HESD) » ou « diagnostic de perte auditive et/ou données audiométriques dans une polyclinique ORL privée plus demande de remboursement d’aides auditives ou de piles pour aides auditives »), et 61317 (5,5%) avaient une suspicion de perte auditive (pas de données dans la base de données HESD, mais au moins l’un des trois autres critères)
  • le suivi médian était de 10 ans (plage de 0,25 à 15,0 ans)
  • la perte auditive était associée à un risque plus élevé de démence que l’absence de perte auditive, après correction pour tenir compte des covariables (HR de 1,07 avec IC à 95% de 1,04 à 1,11) ; il n’y avait pas d’association statistiquement significative entre la suspicion de perte auditive et l’incidence de la démence (HR de 1,03 avec IC à 95% de 0,99 à 1,07)
  • une perte auditive sévère (> 60 dB), mesurée à la fois dans la meilleure oreille et la moins bonne oreille, était associée à un risque plus élevé de démence, par comparaison avec l’absence de perte auditive (respectivement HR de 1,20 avec IC à 95% de 1,09 à 1,32 et HR de 1,13 avec IC à 95% de 1,06 à 1,20) 
  • il n’y avait pas d’association statistiquement significative entre la perte auditive légère et moyenne d’une part et l’incidence de la démence d’autre part
  • par rapport aux personnes sans perte auditive, le risque de démence chez les personnes ayant une perte auditive était plus élevé chez celles qui ne portaient pas d’aides auditives (HR de 1,20 avec IC à 95% de 1,13 à 1,27) que chez celles qui en portaient (HR de 1,06 avec IC à 95% de 1,01 à 1,10).

 

Conclusion des auteurs

Les résultats de cette étude de cohorte suggèrent que la perte auditive est associée à un risque accru de démence, en particulier chez les personnes qui ne portent pas d’aides auditives. Cela suggère que les aides auditives pourraient prévenir ou retarder l’apparition et la progression de la démence. Les estimations du risque étaient plus faibles que dans les études précédentes, ce qui indique la nécessité de mener davantage d’études longitudinales de haute qualité.

 

Financement de l’étude

Subvention du William Demant Foundation  ; il s’agit d’un groupe mondial spécialisé dans les soins de santé auditive et les technologies audio, qui est un actionnaire important dans le domaine des aides auditives et des implants, ainsi que des équipements et services de diagnostic dans le domaine des soins de santé auditive.

 

Conflits d’intérêt des auteurs

Trois auteurs ont reçu des subventions de la William Demant Foundation ; un d’eux a en plus reçu des subventions de la Innovation Foundation Denmark, de Interfond, de Oticon, de GN Hearing et de Widex-Sivantos, et soutien autre que financier de Interacoustics en dehors du travail présenté ; les auteurs ne mentionnent pas d’autres conflits d’intérêt.

 

 

Discussion 

 

Évaluation de la méthodologie

Pour rendre compte de cette étude de cohorte prospective, les chercheurs ont utilisé les directives STROBE (Strengthening the Reporting of Observational Studies in Epidemiology), ce qui permet une évaluation plus précise de la validité des résultats. Un biais de sélection est peu probable car la quasi-totalité de la population source a participé à l’étude, et les seuls critères d’exclusion étaient un diagnostic préexistant de démence et des données insuffisantes concernant les covariables. La population sans perte auditive avait des revenus et des niveaux de formation plus élevés, tandis que la population avec perte auditive était plus âgée et comprenait également plus de retraités. Les auteurs ont pris en compte ces covariables dans l’analyse statistique. Cependant, d’autres covariables importantes susceptibles de jouer un rôle dans le développement de la démence, telles que l’alimentation, l’activité physique et le tabagisme, n’ont pas été prises en compte.
Diverses bases de données ont été utilisées pour obtenir des données aussi complètes et précises que possible sur la perte auditive, le port d’aides auditives et la démence. L’audiométrie tonale est la méthode de référence pour mesurer l’audition ; elle n’est pas affectée par les facteurs pertinents liés au patient qui sont associés à l’âge (9). L’audiométrie tonale est également un examen à faible risque et à faible coût qui fournit des informations essentielles pour le diagnostic et le traitement de la perte auditive (10). 
L’ensemble de la cohorte a fait l’objet d’un suivi prospectif jusqu’au diagnostic de démence (événement), jusqu’au décès, jusqu’au déménagement du sud du Danemark ou jusqu’à la date de fin d’étude (31 décembre 2017), la date la plus rapprochée étant retenue. La probabilité d’un biais de détection est donc très faible.

 

Évaluation des résultats

Bien que la perte auditive et la démence aient été identifiées de manière différente, un risque de biais d’information n’est pas exclu. Par exemple, la mesure de la perte auditive basée sur l’audiométrie ne rend pas compte des difficultés que les personnes âgées peuvent rencontrer lors d’une conversation dans un environnement bruyant (11). Cela a pu conduire à une sous-estimation du lien entre la perte auditive légère à modérée et le déclin cognitif, car l’impact de la perte auditive sur la communication et les capacités fonctionnelles dans la vie quotidienne n’a pas été pris en compte. Le port d’aides auditives a été déterminé en se basant sur l’achat d’un appareil et/ou des piles nécessaires. Cela ne dit pas grand-chose sur l’observance ; elle pourrait avoir été surestimée.
Un diagnostic de démence a été déterminé en se basant sur les informations contenues dans les registres des patients et dans les registres des ordonnances. La validité du diagnostic de démence dans les registres danois peut toutefois être mise en doute. Après un suivi de trois ans, le diagnostic de démence s’est avéré correct dans 85,8% des cas (12). En outre, les différents degrés de démence ou de déclin cognitif n’ont pas été pris en compte dans cette étude. Les personnes malentendantes peuvent également obtenir de moins bons résultats aux tests cognitifs auditifs. En outre, une grande partie de l’effort cognitif dans ces tests est consacrée à l’écoute, ce qui laisse moins de place à d’autres charges cognitives. Cela a pu affecter de manière significative la sensibilité et la spécificité des outils de dépistage cognitif utilisés. Il est donc possible qu’un diagnostic de démence ait été posé à tort chez des personnes souffrant de perte auditive et que le risque de démence ait été surestimé. Cela pourrait aussi expliquer la diminution du risque de démence avec le port d’aides auditives. Une RCT multicentrique menée en ouvert a montré que, par comparaison avec une éducation à la santé, une aide auditive associée à une technologie d’assistance ne montrait pas d’efficacité supplémentaire après trois ans sur les fonctions cognitives des personnes âgées présentant une perte auditive. L’intervention s’est avérée utile dans un sous-groupe présentant davantage de facteurs de risque de déclin cognitif (6,7). Avant de tirer des conclusions définitives, il est donc indispensable de mener des études randomisées contrôlées à grande échelle portant sur l’influence des aides auditives sur le risque de démence chez les personnes souffrant de perte auditive.

 

Que disent les guides de pratique clinique ?

Le guide de pratique de l’Organisation mondiale de la santé (OMS, 2019) indique qu’il faut encourager prestataires de soins de santé à dépister la perte auditive chez les personnes âgées en les interrogeant régulièrement sur leur audition. Un examen otoscopique, le test de la voix chuchotée et un examen audiologique sont également recommandés. Les aides auditives peuvent améliorer la qualité de vie, mais, selon le guide de pratique de l’OMS de 2019, les données probantes sont insuffisantes pour recommander les aides auditives afin de réduire le risque de déclin cognitif ou de démence (13). Le guide NICE sur la démence (NICE, 2018) décrit la détérioration sensorielle (perte auditive) comme une cause réversible de déclin cognitif et un motif d’orientation vers un service de diagnostic spécialisé (14). Selon le JBI (2020), il existe un lien avéré entre la perte auditive et le déclin cognitif et la démence. La perte auditive pourrait donc être un facteur de risque de déclin cognitif et de démence (GRADE A) (15).

 

 

Conclusion de Minerva

Cette étude de cohorte prospective à grande échelle, correctement menée d’un point de vue méthodologique, suggère que la perte auditive, par rapport à une audition normale, est associée à un risque accru de diagnostic de démence, en tenant compte des covariables pertinentes. Chez les personnes malentendantes qui portent des aides auditives, le risque semble être plus faible, mais d’autres études randomisées contrôlées avec une classification précise de la perte auditive et de la démence sont nécessaires pour évaluer l’efficacité des aides auditives dans ce contexte. 

 

 


Références 

  1.  Roth TN, Hanebuth D, Probst R. Prevalence of age-related hearing loss in Europe: a review. Eur Arch Otorhinolaryngol 2011;268:1101-7. DOI: 10.1007/s00405-011-1597-8
  2. Lin FR, Metter EJ, O'Brien RJ, et al. Hearing loss and incident dementia. Arch Neurol 2011;68:214-20. DOI: 10.1001/archneurol.2010.362
  3. Loughrey DG, Kelly ME, Kelley GA, et al. Association of age-related hearing loss with cognitive function, cognitive impairment, and dementia: a systematic review and meta-analysis. JAMA Otolaryngol Head Neck Surg 2018;144:115-26. DOI: 10.1001/jamaoto.2017.2513. Published correction in JAMA Otolaryngol Head Neck Surg 2018;144:176. DOI: 10.1001/jamaoto.2017.3219
  4. Liang Z, Li A, Xu Y, et al. Hearing loss and dementia: a meta-analysis of prospective cohort studies. Front Aging Neurosci 2021;13:695117. DOI: 10.3389/fnagi.2021.695117
  5. Huang AR, Jiang K, Lin FR, Deal JA, Reed NS. Hearing loss and dementia prevalence in older adults in the US. JAMA 2023;329:171-3. DOI: 10.1001/jama.2022.20954
  6. Vandenborre D. Prévenir le déclin cognitif chez les personnes âgées atteintes d’un trouble auditif ? MinervaF 2024;23(4):78-81.
  7. Lin FR, Pike JR, Albert MS, et al; ACHIEVE Collaboration Research Group. Hearing intervention versus health education control to reduce cognitive decline in older adults with hearing loss in the USA (ACHIEVE): a multicentre, randomised controlled trial. Lancet 2023;402:786-97. DOI: 10.1016/S0140-6736(23)01406-X
  8. Cantuaria ML, Pedersen ER, Waldorff FB, et al. Hearing loss, hearing aid use, and risk of dementia in older adults. JAMA Otolaryngol Head Neck Surg 2024;150:157-64. DOI: 10.1001/jamaoto.2023.3509
  9. Hoff M, Göthberg H, Tengstrand T, et al. Accuracy of automated pure-tone audiometry in population-based samples of older adults. Int J Audiol 2024;63:622-30. DOI: 10.1080/14992027.2023.2220909
  10. Carl AC, Hohman MH, Cornejo J. Audiology pure tone evaluation. (Updated 2023 Mar 1). In: StatPearls [Internet]. StatPearls Publishing  2024. Available from: https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK580531/
  11. Slade K, Plack CJ, Nuttall HE. The effects of age-related hearing loss on the brain and cognitive function. Trends Neurosci 2020;43:810-21. DOI: 10.1016/j.tins.2020.07.005
  12. Phung TK, Andersen BB, Høgh P, et al. Validity of dementia diagnoses in the Danish hospital registers. Dement Geriatr Cogn Disord 2007;24:220-8. DOI: 10.1159/000107084 
  13. Risk Reduction of Cognitive Decline and Dementia: WHO Guidelines. World Health Organization, 2019.
  14. National Institute for Health and Care Excellence. Dementia: assessment, management and support for people living with dementia and their carers. (NG97). NICE, June 2018.
  15. Travers C. Evidence summary. Hearing loss: as a risk factor (Dementia). The JBI EBP Database 2020; JBI-ES-296-1.


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Dernière mise à jour du site : 11/10/2024