Analyse


Traitement de l’hypertension chez les plus âgés


28 02 2013

Professions de santé

Analyse de
Beckett N, Peters R, Tuomilehto J, et al; HYVET Study Group. Immediate and late benefits of treating very elderly people with hypertension: results from active treatment extension to Hypertension in the Very Elderly randomized controlled trial. BMJ 2012;344:d7541.


Conclusion
Cette étude de suivi en ouvert de l’étude HYVET chez des personnes très âgées en excellente santé vivant chez elles de manière autonome suggère que la diminution de la mortalité totale et de la mortalité cardiovasculaire après deux ans de traitement actif par indapamide et périndopril versus placebo est maintenue lorsque ce traitement est prolongé pendant un an.



Texte sous la responsabilité de la rédaction néerlandophone

 

Minerva a déjà publié des analyses de l’étude HYVET (1,2). Cette étude clinique randomisée contrôlée par placebo menée chez les personnes âgées d’au moins 80 ans souffrant d’hypertension non compliquée (n=3 845, âge moyen : 83,6 ans ; tension artérielle moyenne : 173/91 mmHg ; antécédents cardiovasculaires chez seulement 11%) a montré qu’un traitement par indapamide éventuellement associé au périndopril (suivant l’avis de l’investigateur) permettait d’obtenir, après deux ans, une diminution de 21% (IC à 95% de 4% à 35%, p=0,019) de la mortalité totale et une diminution de 34% (IC à 95% de 18% à 47%, p<0,001) de l’ensemble des évènements cardiovasculaires (mortalité cardiovasculaire, infarctus du myocarde non fatal, AVC non fatal et insuffisance cardiaque non fatale). L’incidence de l’insuffisance cardiaque a diminué de 64% (IC à 95% de 42% à 78%, p<0,001). Par contre, aucune diminution significative du nombre d’AVC, qui était le critère de jugement primaire, n’a été observée, probablement du fait que l’étude a été arrêtée prématurément pour raison éthique. En effet, après deux ans, une diminution inattendue de la mortalité globale a été observée, fait tout à fait exceptionnel dans une étude portant sur l’hypertension. La protection offerte contre l’insuffisance cardiaque par l’indapamide, analogue thiazidique, associé au périndopril (seuls 25% des patients traités ont reçu l’indapamide en monothérapie) pourrait expliquer ce résultat favorable inattendu.

 

Les investigateurs ont décidé de prolonger l’étude en ouvert pendant un an (3). Tous les patients qui n’avaient présenté aucun critère de jugement durant la phase en double aveugle et qui ont donné leur consentement à la poursuite de leur participation (n=1 712, soit 91% du groupe initial de participants, à savoir 54% provenant du groupe intervention et 46% du groupe placebo) ont reçu un traitement antihypertenseur actif dans cette étude de suivi en ouvert. La préférence allait au traitement administré dans l’étude initiale (indapamide et périndopril), mais l’utilisation d’autres classes de médicaments était également autorisée. Après six mois de traitement en ouvert, il n’y avait déjà aucune différence significative quant à la pression artérielle moyenne entre le groupe intervention initial et le groupe placebo initial. Après un an, la pression artérielle moyenne était respectivement de 143/76 mmHg et de 144/76 mmHg et la quantité de médicaments nécessaires pour atteindre ces chiffres était pratiquement la même dans les deux groupes. L’utilisation d’autres médicaments que les médicaments évalués dans l’étude était l’exception (1,8%).

Après un an d’administration ultérieure du traitement actif en ouvert, il n’y avait plus de différence significative entre les deux groupes en ce qui concerne l’ensemble des évènements cardiovasculaires et en ce qui concerne l’insuffisance cardiaque (rapport de hasards respectivement de 0,78 (IC 0 95% de 0,36 à 1,72) et de 0,28 (IC à 95% de 0,03 à 2,73)), ce qui pourrait signifier que l’instauration plus tardive d’un traitement antihypertenseur offre, elle aussi, les mêmes bénéfices pour ces critères. D’autre part, après un an, il y avait bien encore une différence entre les deux groupes en ce qui concerne la mortalité totale et la mortalité cardiovasculaire (rapport de hasards respectivement de 0,48 (IC à 95% de 0,26 à 0,87) et de 0,19 (IC à 95% de 0,04 à 0,87), ce qui signifie probablement que ces critères de jugement demandent un traitement antihypertenseur plus long pour que le bénéfice soit démontré. Il est à noter qu’à l’inclusion, la pression systolique était supérieure à 160 mmHg et la pression diastolique inférieure à 110 mmHg et que, dans le groupe d’étude constitué de personnes âgées d’au moins 80 ans, la valeur cible <150/80 mmHg pouvait être atteinte sans effets indésirables graves grâce au traitement associant indapamide et périndopril. Cette étude ne permet cependant pas de répondre à la question de savoir si 150/80 mmHg sont aussi les valeurs cibles idéales pour la pression artérielle des personnes hypertendues dans cette tranche d’âge. Comme mentionné dans notre précédente analyse de l’étude HYVET (1), la prudence est également de mise pour la généralisation des données de cette étude de suivi. En effet, il s’agit d’une population particulière constituée de personnes âgées d’Europe de l’Est et d’Asie, et, qui plus est, de personnes très âgées en excellente santé vivant chez elles de manière autonome.

 

Ces données concordent avec l’étude de suivi de l’essai SHEP (4), dans lequel un suivi d’une durée de 14,3 ans d’un traitement en ouvert a montré une baisse supplémentaire de la mortalité cardiovasculaire de 15% chez les patients recevant un traitement diurétique plutôt qu’un placebo. L’étude de suivi de Syst-Eur (suivi d’une durée de 4 ans) (5) a montré qu’un traitement immédiat, versus traitement différé, de l’hypertension systolique isolée avec un antagoniste calcique comme traitement de premier choix avait pour résultat une diminution relative supplémentaire de 28% pour les AVC et de 15% pour les complications cardiovasculaires.

 

Conclusion de Minerva

Cette étude de suivi en ouvert de l’étude HYVET chez des personnes très âgées en excellente santé vivant chez elles de manière autonome suggère que la diminution de la mortalité totale et de la mortalité cardiovasculaire après deux ans de traitement actif par indapamide et périndopril versus placebo est maintenue lorsque ce traitement est prolongé pendant un an.

 

 

Références

  1. De Cort P. Traitement de l’hypertension chez les personnes âgées d’au moins 80 ans. MinervaF 2008;7(9):130-1.
  2. Beckett NS, Peters R, Fletcher AE, et al; HYVET Study Group. Treatment of hypertension in patients 80 years of age or older. N Engl J Med 2008;358:1887-98.
  3. Beckett N, Peters R, Tuomilehto J, et al; HYVET Study Group. Immediate and late benefits of treating very elderly people with hypertension: results from active treatment extension to Hypertension in the Very Elderly randomized controlled trial. BMJ 2012;344:d7541.
  4. Kostis JB. Wilson AC, Fruedenberger RS, et al; SHEP Collaborative Research Group. Long term effect of diuretic based therapy on fatal outcomes in subjects with isolated systolic hypertension with and without diabetes. Am J Cardiol 2005;95:29-35.
  5. Staessen JA, Thijs L, Fagard R, Celis H, et al; Effects of immediate versus delayed antihypertensive therapy on outcome in the Systolic Hypertension in Europe Trial; J Hypertens 2004;22:847-57.
Traitement de l’hypertension chez les plus âgés



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