Analyse


Poly ou monothérapie inhalée pour la BPCO


27 09 2010

Professions de santé

Analyse de
Gaebel K, Blackhouse G, Robertson D, et al. Triple Therapy for Moderate-to-Severe Chronic Obstructive Pulmonary Disease [Internet]. Ottawa: Canadian Agency for Drugs and Technologies in Health; May 2010.


Conclusion
Cette nouvelle synthèse de la littérature montre un bénéfice d’une trithérapie LABA + CSI + tiotropium versus tiotropium pour certains critères de jugement ; pour le nombre d'exacerbations en général, aucune conclusion n'est possible. Le choix entre une monothérapie initiale par CSI, LABA ou tiotropium proposé par les guidelines pour traiter une BPCO modérée à sévère n’est pas remis en question par cette étude.



 

Nous avons déjà abordé plusieurs fois dans Minerva l’évaluation d’associer plusieurs médicaments en inhalation pour traiter une BPCO stable modérée à sévère.

 

Une RCT (1) incluant des patients prenant tous du tiotropium, ne montrait pas de plus-value de l’ajout d’un deuxième bronchodilatateur et d’un corticostéroïde inhalé sur le nombre d’exacerbations (2).

 

Une synthèse méthodique effectuée en 2007 (3) confirmait que les preuves d’un bénéfice se limitent aux patients symptomatiques (dyspnée, exacerbations fréquentes) et avec un VEMS au moins inférieur à 60% (généralement en-dessous de 50%). La littérature ne montrait pas de différence de bénéfice entre tiotropium, ß2-mimétiques à longue durée d’action ou corticostéroïdes inhalés qui peuvent, dans cette indication, être utilisés séparément. L’association de ces médicaments montrait une plus-value faible ou inexistante comparée à une monothérapie (4).

 

Une RCT (5) ne montrait pas de différence entre un traitement associant un ß2-mimétique à longue durée d’action (salmétérol) à un corticostéroïde inhalé (fluticasone) versus un traitement par tiotropium chez des patients présentant une BPCO sévère ou très sévère (6).
En 2009, une nouvelle méta-analyse, cette fois-ci en réseau (7), confirmait l’absence de preuve d’une différence, en termes de prévention des exacerbations, des différents traitements inhalés et de leurs associations, sauf, peut-être, en cas de VEMS ≤ 40% (les LAAC, les CSI et l’association CSI + LABA sont plus efficaces que les LABA utilisés seuls dans ce cas) (8).

 

Une nouvelle synthèse de la littérature (9) évalue plus précisément l’intérêt des différentes associations versus monothérapies. Elle évalue les trithérapies (LAAC + LABA + CSI) versus bronchodilatation double (LAAC + LABA ou SAAC régulier + LABA) versus association (LABA + CSI) versus monothérapie. Seules 4 RCTs évaluent la trithérapie versus autre traitement inhalé, chez des patients souffrant de BPCO modérée à sévère (et très sévère pour 1 des RCTs). Les populations sont hétérogènes :

VEMs variant de 25 à 70% de la valeur prédite. Les critères de jugement sont également variables.

Les preuves sont insuffisantes pour évaluer l’efficacité de la trithérapie versus bronchodilatation double ou versus association. Pour la comparaison trithérapie versus monothérapie (toujours du tiotropium), pas de conclusion possible pour la fréquence des exacerbations en général, moins d’exacerbations provoquant une hospitalisation. Tous les traitements multiples améliorent la qualité de vie versus monothérapie. La trithérapie et l’association améliorent mieux le VEMs que le tiotropium seul. L’association s’accompagne d’un risque accru de pneumonie, effet indésirable déjà commenté pour les CSI dans Minerva (10).

Les auteurs concluent que les données sont insuffisantes pour déterminer si une trithérapie est supérieure à une bronchodilatation double (LABA + LAAC) ou à une association LABA + CSI, mais elle est supérieure à une monothérapie de tiotropium, avec un rapport coût/utilité incrémentiel estimé à l’équivalent d’environ 84.000 euro par QALY. Un chiffre de 30.000 euro est souvent évoqué comme une barrière en Belgique.

 

Conclusion

Cette nouvelle synthèse de la littérature montre un bénéfice d’une trithérapie LABA + CSI + tiotropium versus tiotropium pour certains critères de jugement ; pour le nombre d'exacerbations en général, aucune conclusion n'est possible. Le choix entre une monothérapie initiale par CSI, LABA ou tiotropium proposé par les guidelines pour traiter une BPCO modérée à sévère n’est pas remis en question par cette étude.

 

 

 

Abbréviations :

CSI : corticostéroïde inhalé

LAAC : anticholinergique à longue durée d’action (= tiotropium)

LABA : ß2-mimétique à longue durée d’action

SAAC : anticholinergique à courte durée d’action

SABA : ß2-mimétique à courte durée d’action

 

 

Références

  1. Aaron SD, Vandemheen KL, Fergusson D, et al. Tiotropium in combination with placebo, salmeterol, or fluticasone-salmeterol for treatment of chronic obstructive pulmonary disease. A randomized trial. Ann Intern Med 2007;146:545-55.
  2. Sturtewagen JP. BPCO : pas de plus-value de l’association de tiotropium avec fluticasone et salmétérol. MinervaF 2007;6(8):116-7.
  3. Wilt TJ, Niewoehner D, MacDonald R, Kane RL. Management of stable chronic obstructive pulmonary disease: a systematic review for a clinical practice guideline. Ann Intern Med 2007;147:639-53.
  4. Chevalier P. Médicaments inhalés pour le traitement de la BPCO stable. MinervaF 2008;7(3):34-5.
  5. Wedzicha JA, Calverley PM, Seemungal TA, et al; INSPIRE Investigators. The prevention of chronic obstructive pulmonary disease exacerbations by salmeterol/fluticasone propionate or tiotropium bromide. Am J Respir Crit Care Med 2008;177:19-26.
  6. Chevalier P. BPCO : LABA + corticostéroïde inhalé ou tiotropium ? MinervaF 2008;7(3):36-7.
  7. Puhan MA, Bachmann LM, Kleijnen J, et al. Inhaled drugs to reduce exacerbations in patients with chronic obstructive pulmonary disease: a network meta-analysis. BMC Med 2009;7:2.
  8. Chevalier P. BPCO : quel traitement inhalé ? MinervaF 2009;8(8):115.
  9. Gaebel K, Blackhouse G, Robertson D, et al. Triple Therapy for Moderate-to-Severe Chronic Obstructive Pulmonary Disease [Internet]. Ottawa: Canadian Agency for Drugs and Technologies in Health; May 2010 (CADTH technology report; no. 127). Available from: www.cadth.ca/index.php/en/hta/reports-publications/search/publication/1690 (consulté le 13/09/2010).
  10. Chevalier P. BPCO : corticostéroïdes inhalés et pneumonie. MinervaF 2010;9(3):40.
Poly ou monothérapie inhalée pour la BPCO



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