Analyse


Rétinopathie diabétique : quel traitement modifie son évolution ?


25 11 2010

Professions de santé

Analyse de
Chew EY, Ambrosius WT, Davis MD, et al; ACCORD Study Group; ACCORD Eye Study Group. Effects of medical therapies on retinopathy progression in type 2 diabetes. N Engl J Med 2010; 363:233-44.


Conclusion
Cette étude montre l’intérêt d’un traitement hypoglycémiant intensif (HbA1c cible < 6%) et hypolipidémiant intensif (fénofibrate ajouté à la simvastatine) mais non d’un traitement antihypertenseur intensif (PAS cible < 120 mmHg) sur l’évolution de la rétinopathie à 4 ans. Ces résultats sont cependant à recadrer dans le bénéfice global (ou non) de ces 3 types de traitement.



 

L’efficacité de différentes approches thérapeutiques pour freiner l’évolution d’une rétinopathie diabétique (diabète de type 2) a déjà été abordée dans Minerva. Dans l’étude ADVANCE (1), un traitement intensif du diabète visant une HbA1c ≤ 6,5% n’apporte pas, versus soins courants, de bénéfice significatif pour l’évolution de la rétinopathie (2). Dans l’étude DIRECT-Protect 2 (3), versus placebo, un traitement par candésartan ne montre pas d’efficacité significative pour le critère de jugement primaire, la progression d’au moins 3 grades sur l’échelle ETDRS de la rétinopathie (4).

Nous avons déjà commenté dans Minerva (2,5) les résultats de l’étude ACCORD (6) pour ce qui concerne les aspects cardiovasculaires. Cette étude compare, entre autres, un traitement intensif du diabète avec rosiglitazone (HbA1c cible < 6%) à un traitement de référence (HbA1c cible 7,0 à 7,9%). Pour rappel, en raison d’une mortalité accrue versus traitement de référence, le bras traitement intensif a été prématurément interrompu.

Un sous-groupe de 2 856 patients de cette étude ACCORD a été évalué quant à l’effet des 3 types de traitement sur la progression de la rétinopathie (ACCORD EYE Study (7)) : contrôle glycémique intensif versus courant, simvastatine + fénofibrate versus simvastatine + placebo et traitement antihypertenseur intensif versus de référence. Le critère de jugement primaire est comme dans l’étude DIRECT-Protect 2 la progression sur l’échelle ETDRS + nécessité d’une photocoagulation ou d’une vitrectomie, avec évaluation à 4 ans de traitement. Les patients avec rétinopathie précédemment traitée par photocoagulation ou vitrectomie ont été exclus de cette évaluation. La puissance d’étude nécessaire pour chacun des 3 couples d’options thérapeutiques possibles est bien calculée (88%, 91% et 80%) mais le nombre de sujets à inclure et à suivre durant 4 ans (4 065) n’a pas été atteint au vu de l’arrêt prématuré d’un bras d’étude ACCORD.

Pour le traitement de l’équilibre glycémique (n=2 856), un traitement intensif freine mieux la progression de la rétinopathie qu’un traitement courant : OR ajusté 0,67 (IC à 95% de 0,51 à 0,87 ; p=0,003). Pour les hypolipidémiants (n=1 593), l’association du fénofibrate à la simvastatine a aussi un effet favorable pour la rétinopathie : OR ajusté 0,60 (IC à 95% de 0,42 à 0,87 ; p=0,006). Pour le traitement antihypertenseur (n=1 263), aucun bénéfice significatif d’un traitement intensif n’est montré pour la progression de la rétinopathie : OR ajusté 1,23 (IC à 95% de 0,84 à 1,79 ; p=0,29). Notons cependant qu’aucune des 3 interventions « intensives » ne réduit le risque d’une perte modérée de la vision (= perte de lecture d’au moins 3 lignes sur l’échelle ETDRS).

Cette analyse concernant le bénéfice de différents traitements sur l’évolution de la rétinopathie diabétique doit être recadrée pour sa pertinence clinique avec les résultats de ces traitements sur la morbimortalité cardiovasculaire : danger d’un traitement hypoglycémiant intensif (2), absence d’intérêt bien établi pour les fibrates (8), intérêt d’un traitement antihypertenseur poursuivi chez un diabétique (9).

 

Conclusion

Cette étude montre l’intérêt d’un traitement hypoglycémiant intensif (HbA1c cible < 6%) et hypolipidémiant intensif (fénofibrate ajouté à la simvastatine) mais non d’un traitement antihypertenseur intensif (PAS cible < 120 mmHg) sur l’évolution de la rétinopathie à 4 ans. Ces résultats sont cependant à recadrer dans le bénéfice global (ou non) de ces 3 types de traitement.

 

Références

  1. ADVANCE Collaborative Group, Patel A, MacMahon S, Chalmers J, et al. Intensive blood glucose control and vascular outcomes in patients with type 2 diabetes. N Engl J Med 2008;358:2560-72.
  2. Chevalier P, Wens J. Intensité du contrôle glycémique et risque cardio-(micro et macro)vasculaire. MinervaF 2008;7(8):124-5.
  3. Sjølie AK, Klein R, Porta M, et al; DIRECT Programme Study Group. Effect of candesartan on progression and regression of retinopathy in type 2 diabetes (DIRECT-Protect 2): a randomised placebo-controlled trial. Lancet 2008;372:1385-93.
  4. Chevalier P. Efficacité du candésartan sur la rétinopathie liée à un diabète de type 2. MinervaF 2009;8(9):122-3.
  5. Chevalier P, Jandrain B. Bénéfice cardiovasculaire d’un contrôle glycémique strict ?
    MinervaF 2009;8(7):94-5.
  6. Action to Control Cardiovascular Risk in Diabetes Study Group, Gerstein HC, Miller ME, Byington RP, et al. Effects of intensive glucose lowering in type 2 diabetes. N Engl J Med 2008;358:2545-59.
  7. Chew EY, Ambrosius WT, Davis MD, et al; ACCORD Study Group; ACCORD Eye Study Group. Effects of medical therapies on retinopathy progression in type 2 diabetes. N Engl J Med 2010; 363:233-44.
  8. Jun M, Foote C, Lv J, et al. Effects of fibrates on cardiovascular outcomes: a systematic review and meta-analysis. Lancet 2010;37:1875-84.
  9. De Cort P. Diabète de type 2 : suivi à long terme du contrôle de la pression artérielle. MinervaF 2009;8(7):88-9.
Rétinopathie diabétique : quel traitement modifie son évolution ?



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