Revue d'Evidence-Based Medicine



Les antipsychotiques atypiques dans la schizophrénie



Minerva 2002 Volume 1 Numéro 10 Page 38 - 39

Professions de santé


Analyse de
Geddes J, Freemantle N, Harrison P, Bebbington P, for the National Schizophrenia Guideline Development Group.Atypical antipsychotics in the treatment of schizophrenia: systematic overview and meta-regression analysis. BMJ 2000;321:1371-6.


Conclusion
Cette synthèse méthodique montre une efficacité égale des antipsychotiques conventionnels par rapport aux atypiques ; ils ont cependant plus d’effets indésirables extrapyramidaux. La pertinence clinique de cette différence statistiquement significative n’est cependant pas établie. D’autre part, les antipsychotiques atypiques ont plus d’effets indésirables, parfois graves, et sont beaucoup plus chers. Comme les auteurs de la méta-analyse, nous plaidons pour l’utilisation initiale, en général, des antipsychotiques classiques dans la schizophrénie, excepté si le patient a peu répondu à une administration antérieure d’antipsychotiques conventionnels ou s’il a présenté des effets extrapyramidaux inacceptables. Dans la pratique, le médecin traitant donnera au patient les informations sur les avantages et les inconvénients des deux groupes d’antipsychotiques et partagera la décision finale du choix avec lui.


Minerva « en bref » vous propose de brefs commentaires sur des publications sélectionnées par le comité de rédaction de Minerva. Des études intéressantes et pertinentes pour les médecins généralistes qui ne doivent pas ou ne peuvent pas être discutées dans un cadre plus large trouvent leur place dans cette rubrique. Chaque sélection est brièvement résumée et accompagnée de quelques commentaires faits par un référent. La rédaction de Minerva vous en souhaite une agréable lecture.

 

Résumé

Les auteurs voulaient établir des recommandations bien étayées quant à l’utilisation d’antipsychotiques atypiques dans la schizophrénie. Pour ce faire, ils ont réalisé une synthèse méthodique est bâtie sur une question (de recherche) entraînant une recherche systématique des études originales qui pourraient apporter une réponse à cette question. Elle mentionne également les bases de données consultées et les méthodes d’analyse utilisées. Les résultats figurant dans les études et les caractéristiques individuelles de ces différentes études sont analysés et évalués de manière explicite. Chaque méta-analyse est précédée, en principe, d’une synthèse méthodique.">synthèse méthodique et une méta-analyse de régression des RCTs. Cinquante-deux RCTs relatives aux antipsychotiques atypiques ou classiques concernant 12 649 patients ont été identifiées. Les médicaments étudiés sont : amisulpride, clozapine, olanzapine, quétiapine, rispéridone, sertindole, comparés à l’halopéridol et à la chlorpromazine. Les critères de jugement primaires sont les symptômes psychotiques, l’arrêt du traitement, la qualité de vie et les effets indésirables, plus particulièrement extrapyramidaux.   Les résultats sont particulièrement hétérogènes en ce qui concerne la réduction des symptômes et les arrêts de traitement. Une méta-analyse de régression montre que les doses des antipsychotiques classiques utilisées peuvent expliquer ces différences. Comparé à une dose d’halopéridol < 12 mg/j, l’utilisation d’ antipsychotiques atypiques n’offre aucun avantage en ce qui concerne l’efficacité ou les arrêts de traitement, mais ils provoquent cependant moins d’effets secondaires extrapyramidaux.   Les auteurs concluent qu’il n’y a pas de preuve évidente que les antipsychotiques atypiques soient plus efficaces ou mieux tolérés que les antipsychotiques classiques. C’est pourquoi ils conseillent de commencer généralement par les antipsychotiques classiques lors d’un accès de schizophrénie excepté si le traitement s’est révélé précédemment inefficace ou provoquant trop d’effets indésirables extrapyramidaux chez le patient concerné.  

 

Discussion

Au point de vue méthodologique, il faut souligner qu’il n’est pas évident de savoir si les études concernent des patients ambulants ou institutionnalisés. L’aspect positif est la correction des résultats en fonction de la dose d’halopéridol, ce qui permet des conclusions importantes avec des conséquences pour la pratique.   Dans un éditorial annexe 1, la discussion concerne la différence entre les options des auteurs de la revue systématique et la réalité. Geddes et al. optent pour la prescription, en général, d’un antipsychotique conventionnel, mais aux USA, 3 à 4 fois plus d’antipsychotiques atypiques sont prescrits 1. Les auteurs de cet éditorial attirent l’attention sur le fait que de nouveaux médicaments sont toujours accueillis avec un grand enthousiasme avant que tous leurs effets secondaires ne soient connus ; la pression de l’industrie pharmaceutique fait le reste. Ils font remarquer qu’il existe des raisons plus intrinsèques. Dans la synthèse méthodique analysée ici, comme dans d’autres publications 2, les effets indésirables extrapyramidaux se produisent moins souvent avec les antipsychotiques atypiques. Ce phénomène n’est pas quantifié dans cette méta-analyse, de sorte que la pertinence clinique de cette observation n’est pas d’emblée évidente. Pour beaucoup de patients c’est le facteur central de leur traitement. Le grand avantage des antipsychotiques atypiques n’est pas au niveau de leur effet antipsychotique mais surtout dans une amélioration subjective de la thymie, de la cognition et dans une meilleure compliance. À l’encontre, deux tares objectives pèsent contre les antipsychotiques atypiques depuis des années, il est connu qu’ils ont d’autres effets indésirables que les antipsychotiques conventionnels comme la prise de poids ou l’agranulocytose pour la clozapine. Une étude cas-témoins a été publiée récemment, démontrant que l’olanzapine donnait un risque significativement accru de diabète et la rispéridone une tendance non significative à cet accroissement de risque. Une augmentation des taux sériques de cholestérol et de lipides a été rapportée, de même qu’un risque accru de myocardite et de cardiomyopathie 3. Dans un futur proche, d’autres effets indésirables seront sans doute encore rapportés. De plus, les nouveaux antipsychotiques sont beaucoup plus chers. Pour s’en sortir parmi ces contradictions, les auteurs de l’éditorial proposent d’informer correctement le patient et de l’impliquer dans le choix ; au Royaume Uni, un choix systématique pour les antipsychotiques atypiques est fait, principalement en raison de leurs moindres effets indésirables extrapyramidaux et du fait qu’ils soient nouveaux. L’éditorial s’achève sur des considérations sur l’éternelle tension entre la pression des firmes pharmaceutiques, les résultats des bonnes RCTs et, enfin, la complexité de la pratique clinique.

 

Conclusion

Cette synthèse méthodique montre une efficacité égale des antipsychotiques conventionnels par rapport aux atypiques ; ils ont cependant plus d’effets indésirables extrapyramidaux. La pertinence clinique de cette différence statistiquement significative n’est cependant pas établie. D’autre part, les antipsychotiques atypiques ont plus d’effets indésirables, parfois graves, et sont beaucoup plus chers. Comme les auteurs de la méta-analyse, nous plaidons pour l’utilisation initiale, en général, des antipsychotiques classiques dans la schizophrénie, excepté si le patient a peu répondu à une administration antérieure d’antipsychotiques conventionnels ou s’il a présenté des effets extrapyramidaux inacceptables. Dans la pratique, le médecin traitant donnera au patient les informations sur les avantages et les inconvénients des deux groupes d’antipsychotiques et partagera la décision finale du choix avec lui.    

Conflits d’intérêt/financement

Cette recherche a été financée par l’“English Department of Health”. Les auteurs de cette revue ont reçu un soutien financier de différentes firmes pharmaceutiques. 

Références

  1. Kapur S, Remington G. Atypical antipsychotics. Patients value the lower incidence of extrapiramidial side effects. Editorial. BMJ 2000;321:1360-1.
  2. Leucht S, Pitschel-Walz G, Abraham D, Kissling W. Efficacy and extrapyramidal side-effects of the new antipsychotics olanzapine, quetiapine, risperidone, and sertindole compared to conventional antipsychotics and placebo. A meta-analysis of randomized controlled trials. Schizophr Res 1999;35:51-68.
  3. Koro C, Fedder D, L’Italien G, et al. Assessment of independent effect of olanzapine and risperidone on risk of diabetes among patients with schizophrenia: population based nested case-control study. BMJ 2002;325:243-8.

 

Noms commerciaux

Amisulpride : non commercialisé en Belgique     

Chlorpromazine: non commercialisé en Belgique

Clozapine : Leponex®                                       

Halopéridol : Haldol®

Olanzapine : Zyprexa®                                      

Quetiapine : Seroquel®

Rispéridone : Risperdal®                                  

Sertindole : non commercialisé en Belgique

Les antipsychotiques atypiques dans la schizophrénie

Auteurs

De Meyere M.
Vakgroep Huisartsgeneeskunde en Eerstelijnsgezondheidszorg, UGent
COI :

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