Analyse
Tamsulosine et nifédipine : inefficaces pour éliminer une lithiase urétérale
Nous avons analysé en 2006 dans la revue Minerva (1) une méta-analyse (2) montrant l’intérêt en termes de soulagement de la douleur d’un traitement par AINS versus opioïdes chez des adultes présentant une colique néphrétique sur lithiase confirmée par imagerie dans la majorité des cas. Nous avons aussi commenté en 2007 (3) une méta-analyse (4) montrant que chez des adultes d’âge moyen (35 à 45 ans) présentant une lithiase majoritairement urétérale distale (dernier tiers), l’administration d’un antagoniste calcique (nifédipine) ou d’un alpha-bloquant (tamsulosine le plus souvent) permettait un passage plus fréquent et aussi souvent plus rapide de la lithiase. Cette conclusion était cependant basée sur des études de petite taille (de 15 à 46 patients par bras d’étude) et demandait donc confirmation dans de plus larges populations. Pour rappel, la probabilité d’une élimination spontanée d’une lithiase urétérale sur 4 semaines se situe entre 50% et 95% en fonction de sa taille et de sa position (5).
Une RCT de bonne qualité (6), multicentrique (24 hôpitaux au Royaume Uni), en double aveugle, incluant 1167 patients âgés en moyenne de 43 ans (DS de 12,3 ans), publiée en 2015, apporte une réponse plus fiable pour la tamsulosine 0,4 mg (n = 391) ou la nifédipine 30 mg (n = 387) versus placebo (n = 389), médicaments pouvant être pris jusqu’à 4 semaines (moyenne de 10 à 12 jours selon le groupe). Les patients présentaient une lithiase urétérale, en majorité (74%) ≤ 5 mm (maximum 10 mm) et généralement (64%) localisée dans le bas uretère. Etaient exclus les patients de > 65 ans, les patients présentant une lithiase ≥ 10 mm, les patients nécessitant une intervention immédiate (jugement clinique), en cas de sepsis ou de débit de filtration glomérulaire (DFG) estimé < 30 ml/min.
Pour le critère de jugement primaire, à savoir la proportion de sujets ne nécessitant pas d’autre intervention pour éliminer la lithiase durant les 4 semaines après la randomisation, avec analyse en ITT modifiée (tous les patients avec une donnée pour ce critère, soit 97% des sujets), les résultats sont de 80% sous placebo, 81% sous tamsulosine et 80% sous nifédipine sans différence donc significative versus placebo. En analyses de sous-groupes, les résultats sont concordants en fonction du sexe, de la taille et de la localisation de la lithiase. Le délai médian de passage de la lithiase est de 14 jours sous placebo (IQR de 5 à 25 jours). Des effets indésirables sérieux ont été observés chez 3 patients sous nifédipine et chez un patient sous placebo.
Conclusion
Cette première RCT de bonne qualité méthodologique et dans une population suffisante (1167 sujets < 65 ans) ne montre pas d‘intérêt de l’administration de nifédipine 30 mg ou de tamsulosine 0,4 mg versus placebo pour l’élimination d’une lithiase urétérale de moins de 10 mm sur 4 semaines de traitement. Les précédentes preuves d’efficacité, sommées à partir de petites études (méta-analyse sur un total de 693 patients), ne sont donc pas confirmées.
Références
- Chevalier P. Opioïdes ou AINS dans la colique néphrétique? MinervaF 2006;5(3);47-8.
- Holdgate A, Pollock T. Systematic review of the relative efficacy of non-steroidal anti-inflammatory drugs and opioids in the treatment of acute renal colic. BMJ 2004;328:1401.
- Chevalier P. Traitement médical pour le passage d’une lithiase urétérale. MinervaF 2007;6(3):41-2.
- Hollingsworth JM, Rogers MA, Kaufman SR, et al. Medical therapy to facilitate urinary stone passage: a meta-analysis. Lancet 2006;368:1171-9.
- Miller OF, Kane CJ. Time to stone passage for observed ureteral calculi: a guide for patient education. J Urol 1999;162:688-91.
- Pickard R, Starr K, MacLennan G, et al. Medical expulsive therapy in adults with ureteric colic : a multicentre, randomised, placebo-controlled trial. Lancet 2015;386:341-9.
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