Revue d'Evidence-Based Medicine



L'hormone parathyroïdienne prévient-elle les fractures liées à l'ostéoporose?



Minerva 2002 Volume 1 Numéro 10 Page 42 - 43

Professions de santé


Analyse de
Neer RM, Arnaud CD, Zanchetta JR, et al. Effect of parathyroid hormone (1-34) on fractures and bone mineral density in postmenopausal women with osteoporosis. N Engl J Med 2001;344:1434-41.


Conclusion
L’hormone parathyroïdienne a un effet préventif démontré sur l’apparition des fractures vertébrales. Son risque de provoquer un ostéosarcome est encore insuffisamment prouvé chez l’homme. Un traitement avec l’HPT est actuellement à réserver à des centres spécialisés.


Minerva « en bref » vous propose de brefs commentaires sur des publications sélectionnées par le comité de rédaction de Minerva. Des études intéressantes et pertinentes pour les médecins généralistes qui ne doivent pas ou ne peuvent pas être discutées dans un cadre plus large trouvent leur place dans cette rubrique. Chaque sélection est brièvement résumée et accompagnée de quelques commentaires faits par un référent. La rédaction de Minerva vous en souhaite une agréable lecture.

Résumé

Des médicaments très divers sont testés dans le cadre de la prévention de fractures liées à l’ostéoporose postménopausique (œstrogènes, modulateurs sélectifs des récepteurs œstrogéniques, bisphosphonates, calcitonine, vitamine D et calcium). En résumé, on peut dire de ces substances qu’elles peuvent diminuer la résorption osseuse, qu’elles peuvent augmenter légèrement la densité osseuse et que certaines molécules réduisent le risque de fracture. Aucun produit ne rétablit la masse osseuse normale ni sa solidité antérieure1. En fonction d’un effet bénéfique possible de sa part sur la perte osseuse, d’un point de vue physiopathologique, une étude a été menée pour vérifier si l’hormone parathyroïdienne (HPT) pouvait protéger des femmes qui ont déjà présenté une fracture vertébrale, de l’apparition de fractures ostéoporotiques (prévention secondaire).

Dans une RCT internationale multicentrique, 1637 femmes ménopausées présentant une fracture vertébrale prouvée radiologiquement à l’anamnèse ont reçu quotidiennement 20 µg ou 40 µg d’HPT ou un placebo en injection sous-cutanée. Les critères d’inclusion étaient: au minimum 1 déformation vertébrale radiologique sévère (différence de hauteur vertébrale de 26- 40%) ou 2 déformations moins importantes (différence de 20-25%); s’il y avait moins de 2 petites fractures radiologiques, la densité osseuse du col du fémur ou des vertèbres lombaires devait être inférieure (d’au moins 1 DS) au T-score des femmes entre 20 et 35 ans; les femmes devaient pouvoir se déplacer sans l’aide de tiers.

  Les critères d’exclusion étaient: maladie avec répercussion sur le métabolisme osseux, lithiase urinaire au cours des 5 années précédant l’étude, tests hépatiques perturbés, créatininémie > 2 mg/100 ml, abus d’alcool ou de médicaments, prise de médicaments agissant sur le métabolisme osseux (2-24 mois avant le début de l’étude). Ces femmes ont été suivies pendant 24 mois (suivi de la calcémie inclus).Le critère de jugement clinique final était l’apparition d’une fracture vertébrale radiologique et avec comme critère de jugement intermédiaire l’évolution de la masse osseuse mesurée tout au long de l’étude. Les différentes formes de biais ont été recherchées et l’analyse était réalisée en intention de traiter.

Dans le groupe placebo, de nouvelles fractures vertébrales radiologiques sont apparues chez 14 % des femmes versus 5% et 4% dans les groupes traités par respectivement 20 µg et 40 µg d’HPT. Le risque relatif est le quotient de deux risques (absolus), le risque dans le groupe exposé ou intervention et le risque dans le groupe contrôle. Dans une étude d’intervention, le risque relatif est une estimation de la probabilité que le résultat (par exemple survenue d’un décès) dans le groupe intervention soit autant de fois supérieur (RR > 1) ou inférieur (RR < 1) à celui observé dans le groupe contrôle. Le risque relatif n’a pas d’unité de mesure.">risque relatif (RR) d’une fracture était respectivement de 0,35 (IC à 95%: 0,22-0,55) et 0,31 (IC à 95%: 0,19-0,50) comparé au groupe placebo. Les fractures localisées à d’autres endroits sont apparues chez 6% des femmes sous placebo contre 3% dans les deux groupes recevant de l’HPT: RR 0,47 (IC à 95%: 0,25-0,88). Des maux de dos apparaissant ou s’amplifiant ont été signalés par 23 % des femmes dans le groupe avec placebo contre seulement 17 % et 16% dans les groupes avec l’HPT (respectivement 20 µg et 40 µg). Ces données sont comparables avec les résultats radiographiques. Les femmes traitées avaient de 35 % à 40 % moins de risque de développer une nouvelle fracture non vertébrale que les femmes sous placebo et respectivement 53 % et 54% moins de risque de survenue d’une nouvelle fracture spontanée résultant de la fragilité osseuse. Le traitement avec l’HPT a fait augmenter la masse osseuse de 9 à 13 % dans les vertèbres lombaires et de 3 à 6% pour le col du fémur. Les effets secondaires légers de l’HPT furent limités et peu importants (principalement nausées et maux de tête).

Analyse

Les résultats de cette recherche sont-ils pertinents comparés aux résultats de précédentes études ? La réduction du risque de fracture de 65 % à 69 % est plus élevée que dans d’autres études, précisément 48 % pour l’alendronate 10 mg/jour, 41% pour le résidronate 5 mg/jour et 30 % pour le raloxifène 60 mg/jour. Les données relatives aux œstrogènes viennent principalement d’études de cohortes et d’études cas-témoins. Des effets contradictoires de la calcitonine sont relevés dans la littérature et les données chiffrées publiées quant à l’effet de la vitamine D et du calcium sur les fractures vertébrales sont insuffisamment chiffrées 1.

Il est vraiment nécessaire de modérer la conclusion des auteurs, car le risque sous-jacent (pour autant qu’il soit possible de l’estimer totalement) était plus faible dans cette étude que pour les études sur l’alendronate et celles sur le résidronate. Dans cette étude, les femmes incluses avaient un meilleur T-score. Un des points négatifs de cette intervention est la propriété de la HPT pour induire un ostéosarcome chez les rats. Une précédente étude d’une durée de 3 ans n’a pas non plus démontré ce risque chez l’homme.

 

Conclusion

L’hormone parathyroïdienne a un effet préventif démontré sur l’apparition des fractures vertébrales. Son risque de provoquer un ostéosarcome est encore insuffisamment prouvé chez l’homme. Un traitement avec l’HPT est actuellement à réserver à des centres spécialisés.

 

Conflits d’intérêts/financement

Cette étude a été financée par la firme Eli Lilly. Un des auteurs est a des intérêts dans cette firme.

 

Références

  1. Themanummer Osteoporose. Huisarts Nu (Minerva) 2001;30(2):64-93.
L'hormone parathyroïdienne prévient-elle les fractures liées à l'ostéoporose?

Auteurs

Vermeire E.
Vakgroep eerstelijns- en interdisciplinaire zorg, Centrum voor Huisartsgeneeskunde, Universiteit Antwerpen
COI :

Glossaire

biais, risque relatif

Code





Ajoutez un commentaire

Commentaires