Analyse


Risque de thromboembolie veineuse suite à la prise de contraceptifs oraux à des doses différentes de progestagènes et d’estrogènes


28 09 2012

Professions de santé

Analyse de
Lidegaard Ø, Nielsen LH, Skovlund CW, et al. Risk of venous thromboembolism from use of oral contraceptives containing different progestogens and oestrogen doses: Danish cohort study, 2001-9. BMJ 2011;343:d6423.


Conclusion
Cette étude de cohorte montre que les femmes qui prennent actuellement des contraceptifs oraux courent un risque trois fois plus élevé de TEV avec une pilule à base de lévonorgestrel ainsi qu’un risque six fois plus élevé lorsqu'elles prennent une pilule à base de désogestrel, de gestodène ou de drospirénone, comparé aux femmes qui ne prennent pas de contraceptifs oraux. Une pilule à base de lévonorgestrel comme progestatif reste donc le premier choix lors de l’instauration d’une contraception orale.



Texte publié sous la responsabilité de la rédaction néerlandophone

 

 

En 2001, Minerva a publié un article analysant une étude cas-témoins et de cohorte sur le risque de thrombo-embolie veineuse (TEV) suite à l'emploi de la pilule (1). Cette étude était basée sur les données provenant de la General Research Practice Database de médecins généralistes britanniques (1,2). Après cinq ans de controverse, les auteurs ont conclu que la prise de contraceptifs oraux augmentait le risque de TEV et que ce risque était deux fois plus élevé chez les femmes qui prenaient la pilule de troisième génération (désogestrel et gestodène) comparé aux femmes qui prenaient la pilule de deuxième génération (lévonorgestrel).

Dans une large étude de cohorte danoise (3) analysant plus de 8 010 290 femmes-année, les premiers 4 256 épisodes de TEV furent enregistrés, dont 2 847 furent confirmés. Ces femmes avaient bénéficié d’un traitement anticoagulant pendant au moins quatre semaines. Comparé aux  femmes qui ne prenaient pas de pilule combinée à 30-40 µg d’éthynilestradiol, le risque relatif était respectivement de 2,9 (IC à 95% de 2,2 à 3,8) pour les femmes qui prenaient du lévonorgestrel, de 6,6 (IC à 95% de 5,6 à 7,8) pour celles qui prenaient du désogestrel, de 6,2 (IC à 95% de 5,6 à 7,0) pour celles qui prenaient du gestodène, et de 6,4 (IC à 95% de 5,4 à 7,5) pour celles qui prenaient de la  drospirénone. Ceci signifie que le risque, corrigé pour la durée de l’emploi, est environ deux fois plus élevé pour les pilules de troisième génération et la drospirénone par rapport au lévonorgestrel. Dans la pratique, cela signifie que le risque absolu est d’environ 10 incidents par 10 000 femmes-année et que 2 000 femmes doivent changer de pilule pour éviter un incident supplémentaire. Aucun risque accru n’a été constaté chez les utilisatrices de pilules ne contenant que de la progestérone.

Un des points forts de cette étude est la validité externe élevée, grâce à l'inclusion de toutes les femmes danoises qui n'étaient pas enceintes sur une période de neuf ans et de la restriction de l'analyse aux TEV confirmées. Les auteurs n'ont pas pu corriger pour le IMC et les risques familiaux. Aucune étude de ces dix dernières années n'a réussi à démontrer qu'il s'agissait là de facteurs de confusion.

Six autres études (4-10) ont encore été publiées après 2001, dont quatre ont montré une différence significative entre l'emploi de pilules contraceptives à base de gestodène ou de désogestrel, comparé au lévonorgestrel (4,6–8). Dans deux études il n’y avait pas de différence (5,9). Dans quatre  études, un risque relatif plus élevé de TEV a été constaté pour les pilules à base de drospirénone, comparé au lévonorgestrel (7,8,10,11), tandis que deux autres n’ont pas montré de différence (5,9). Ce qui est surprenant, c’est que ces deux dernières études étaient réalisées par le même groupe de recherche. Un conflit d'intérêt n'est donc pas exclu.

Cette étude confirme les décisions publiées antérieurement. Lorsqu’une patiente souhaite une contraception orale, le médecin conseille de préférence une pilule de deuxième génération à base de lévonorgestrel. Il n'est cependant pas nécessaire qu’une patiente qui se sent bien avec sa contraception orale actuelle, change de pilule.

 

Conclusion

Cette étude de cohorte montre que les femmes qui prennent actuellement des contraceptifs oraux courent un risque trois fois plus élevé de TEV avec une pilule à base de lévonorgestrel ainsi qu’un risque six fois plus élevé lorsqu'elles prennent une pilule à base de désogestrel, de gestodène ou de drospirénone, comparé aux femmes qui ne prennent pas de contraceptifs oraux. Une pilule à base de lévonorgestrel comme progestatif reste donc le premier choix lors de l’instauration d’une contraception orale (12).

 

Références

  1. Cosyns M. Hoger risico op trombo-embolie bij derde generatie orale anticonceptiva? Minerva 2001;30(10):472-5.
  2. Jick H, Kaye JA, Vasilakis-Scaramozza C, Sjick SS. Risk of venous thromboembolism among users of third generation oral contraceptives compared with users of oral contraceptives with levonorgestrel before and after 1995: cohort and case-control analysis. BMJ 2000;321:1190-5.
  3. Lidegaard Ø, Nielsen LH, Skovlund CW, et al. Risk of venous thromboembolism from use of oral contraceptives containing different progestogens and oestrogen doses: Danish cohort study, 2001-9. BMJ 2011;343:d6423.
  4. Lidegaard Ø, Edström B, Kreiner S. Oral contraceptives and venous thromboembolism. A five-year national case-control study. Contraception 2002;65:187-96.
  5. Dinger JC, Heinemann LA, Kühl-Habich D. The safety of a drospirenone-containing oral contraceptive: final results from the European Active Surveillance study on oral contraceptives based on 142,475 women years of observation. Contraception 2007;75:344-54.
  6. Jick SS, Kaye JA, Russmann S, Jick H. Risk of nonfatal venous thromboembolism in women using a contraceptive transdermal patch and oral contraceptives containing norgestimate and 35 microg of ethinyl estradiol. Contraception 2006;73:223-8.
  7. van Hylckama Vlieg A, Helmerhorst FM, Vandenbroucke JP, et al. The venous thrombotic risk of oral contraceptives, effects of oestrogen dose and progestogen type: results of the MEGA case-control study. BMJ 2009;339:b2921.
  8. Lidegaard Ø, Løkkegaard E, Svendsen AL, Agger C. Hormonal contraception and risk of venous thromboembolism: national follow-up study. BMJ 2009;339:b2890.
  9. Dinger J, Assmann A, Möhner S, Minh TD. Risk of venous thromboembolism and the use of dienogest- and drospirenone-containing oral contraceptives: results from a German case-control study. J Fam Plann Reprod Health Care 2010;36:123-9.
  10. Parkin L, Sharples K, Hernandez RK, Jick SS. Risk of venous thromboembolism in users of oral contraceptives containing drospirenone or levonorgestrel: nested case-control study based on UK General Practice Research Database. BMJ 2011:340:d2139.
  11. Jick SS, Hernandez RK. Risk of non-fatal venous thromboembolism in women using oral contraceptives containing drospirenone compared with women using oral contraceptives containing levonorgestrel: case-control study using United States claims data. BMJ 2011;340:d2151.
  12. Orale anticonceptie. Domus Medica, mei-juni 2012.
Risque de thrombo-embolie veineuse suite à la prise de contraceptifs oraux à des doses différentes de progestagènes et d’estrogènes

Auteurs

Peremans L.
Vakgroep Eerstelijns- en Interdisciplinaire Zorg, Universiteit Antwerpen; Departement Maatschappelijke Gezondheidszorg, Vrije Universiteit Brussel
COI :

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